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Mandat N° 4 - Laïcité - La révolution tunisienne

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La révolution et après ?


Qui sont ces étranges personnages qui sillonnent nos rues, arborant à dessein une inélégance recherchée  et une arrogante agressivité ? Sourcil froncé, barbe hirsute, front marqué du sceau de la dévotion, sûrs d’eux-mêmes comme de la mission qu’ils se sont assignée, ils jugent, menacent, corrigent, s’il le faut, par le bâton, le couteau et l’épée, ceux qui savent encore créer, penser et aimer.
« Ce sont des Tunisiens, nous apprend M. Rached Ghannouchi, président du parti islamiste, Ennahdha. Ils ne viennent pas d’une autre planète ! » Certes. Je me frotte les yeux et je me dis : « Mais alors, viendrais-je, moi, d’une autre planète ? Mon pays, celui de mes parents et de mes aïeux, ne serait donc pas la Tunisie ?»
  
Le 23 octobre 2011, en effet, la géographie de notre monde change. Ce jour-là, une étoile éclaire le ciel tunisien. Le futur chef du gouvernement, M. Hamadi Jébali, la voit. Il en décrypte aussitôt le sens et en explicite la portée : Dieu a désigné les braves, ils devront œuvrer à l'éveil et à l’unification du monde musulman, mieux encore, à l’instauration du VI e Califat rachidien. Programme ambitieux et peu réaliste. Mais,  l’ordre vient de Dieu et nul ne peut le négliger.

Malgré sa fatigue et son vieil âge, la Tunisie se plie alors au commandement.  Horrifiée désormais par la proximité de l’Europe, terre honnie de Dieu, dont on peut user, telle une fille de joie, et que l’on peut donc, en toute conscience, lapider, la Tunisie se détache de la vieille Afrique.

Oubliant sa révolution de la misère, ses morts, ses blessés, ses revendications sociales, son aspiration à la liberté, elle avance, cahotante, à la recherche du lieu que nulle autre culture et nulle autre civilisation n’ont souillé de leurs empreintes. L’Arabie fascine, les Émirats et le Qatar aussi. On aime leur jeunesse, leur engourdissement intellectuel, on aime leur puissance, leur richesse, leur tapageuse dévotion, leurs lois charaïques, leurs femmes encapuchonnées, la prodigalité de leurs princes et leurs voitures rutilantes, le tracé de leurs larges avenues, l’accent traînant de leurs habitants et leur « onctuosité pateline ».  
Eux au moins, n’ont pas été dépossédés par l’Occident de leur culture et de leur religion. Il ne leur a pas insufflé le venin du doute et du rire malfaisant. Chez eux, on ne chante pas, on ne danse pas, on ne peint pas, et, si par mégarde un mauvais génie s’amuse à les pousser à enfreindre la loi, ce n’est pas grave : ils se cachent. Le mal, comme chacun sait, est contagieux. Hommes du désert, ils attaquent sans détours. Ils dédaignent le langage allusif tissé de mots, d’images ou de dessins. Leurs principes sont clairs et tout simples. Ils s’énoncent en deux mots : al-haram et al-halal (le « licite » et l’ « illicite ») et ils ont la netteté des lames, des couteaux et des épées qui sanctionnent leur manquement.
 
La révolution tunisienne est confisquée, et si bien confisquée que l’enthousiasme a cédé sa place au découragement. La déception et l’amertume marquent aujourd’hui les physionomies et les conversations des Tunisiens. La peur resurgit, avec ses sœurs, l’autocensure et la délation. Bon nombre de nos concitoyens se demandent si la nouvelle Constitution verra le jour, si le pays ne court pas vers la guerre civile et s’il n’avance pas à reculons. Il y a quelques mois seulement, instruits par leur malheureuse expérience, nos amis algériens nous prédisaient un avenir similaire à leur passé, fait de violence et de haine. Nous jugions alors leurs propos absurdes et leur méconnaissance de notre pays avérée.
Aujourd’hui, nous les écoutons et nous nous disons : peut-être avaient-ils raison, car notre révolution n’appartient plus désormais à ceux qui l’ont faite, à  ceux qui ont souffert de l’exclusion, de l’indigence matérielle, culturelle et morale, elle a été captée par ceux qui, se réclamant de l’islam politique, avaient été muselés, emprisonnés, torturés, sous le régime de Zine Al-Abdine Ben Ali.
Certes la répression dont ont été victimes les islamistes est sans aucun doute condamnable, et il ne viendrait à l’esprit d’aucun démocrate digne de ce nom de contester le droit de chacun à la libre expression de ses idées et de ses convictions politiques. Mais la mainmise de la Nahdha sur les institutions et les rouages de l’État – mainmise condamnée au demeurant par le président de la République lui-même –, sa volonté de détruire tout contrepouvoir, de museler tout contestataire, sa complaisance manifeste envers la terreur salafiste qu’elle couvre, voire la protection qu’elle lui accorde, ne peuvent ni se justifier ni être acceptées.

La Nahdha s’est imposée en toute légitimité. Nul ne le discute. Mais son relatif succès électoral l’autorise-t-il à laisser déferler des hordes de djihadistes qui s’appliquent à défigurer le paysage urbain, à annihiler toute différence ethnique, religieuse ou culturelle et à détruire les institutions ? Telle une secte, ces derniers formatent les esprits des enfants, distillant la haine et libérant une malsaine libido. Si un simple regard masculin sur une chevelure féminine ou un bras dénudé les indispose au point qu’il justifie l’enfermement des femmes, des jeunes filles et parfois même des petites filles derrière voiles et niqab, cela révèle une société malade.

Le gouvernement nahdhaoui de la troïka –l’a-t-on assez répété ? – est légitime. Cela est admis. Mais ce bon droit repose sur des discours fallacieux. Défenseurs d’un islam qui, selon leurs allégations, fut menacé, voire anéanti par Habib Bourguiba puis par Zine Al-Abdine Ben Ali, les nahdhaouis auraient été alors peu soutenus par une société civile qui, de par son silence, se serait rendue complice des exactions de la dictature*.
Cette argumentation, somme toute habile puisqu’elle permet de culpabiliser une frange de la société civile – dont la résistance à la dictature n’est pourtant pas à démontrer (ATFD, AFTURD, LTDH, CNLT) – tout en sensibilisant une autre partie de la société au faux problème de la perte identitaire, nécessite aujourd’hui une mise au point.

Il semble abusif et même inexact d’affirmer une absence soutien de la société civile, comme ne cessent de le déclamer les constituant(e)s nahdhaoui(e)s, l’existence même du Collectif du 18 octobre 2005 pour les droits et les libertés et de sa plateforme est une éloquente démonstration**. Rappelons, par ailleurs, que la répression n’était jamais relayée par les médias et que l’islam politique se réclamait alors d’aller à l’encontre des principes démocratiques. Le programme politique du Mouvement de la tendance islamique (MTI), devenu Ennahdha, en 1989, n’a pas laissé que de bons souvenirs.

En Tunisie, l’islam n’a jamais été menacé et il est déloyal de le nier. Contrairement aux déclarations de M. Rached Ghannouchi, Zine Al-Abdine Ben Ali a bien plutôt renforcé la pratique religieuse. En 1988, il réinstaure la ro’yya*** ainsi que l’appel à la prière sur les chaînes de radio et de télévision. Les cérémonies religieuses étaient célébrées en grande pompe. Toutes ces pratiques n’étaient évidemment que calculs politiques et si elles relevaient, tout comme les enseignements des « salafistes », du pur formalisme, elles n’en révèlent pas moins l’enracinement évident de l’islam en Tunisie et la nécessité pour tout politique de compter avec cette réalité.
Habib Bourguiba, qui est aujourd’hui diabolisé, n’a jamais rejeté l’islam et en a fait son cheval de bataille contre le colonialisme. Lorsqu’en 1961, il a incité les Tunisiens à ne pas observer le jeûne, il a eu recours au langage religieux. N’a-t-il défini le travail et la lutte contre le sous-développement comme une forme de « djihad » suprême ? Et malgré son incontestable autorité, sa notoriété et la légitimité que lui avait conférées la lutte nationale, il fut alors contesté.
Ni les nahdhaouis, ni les dits « salafistes » ne peuvent prétendre aujourd’hui avoir pour mission de redonner force et brio à l’islam, en Tunisie. La religion musulmane y est déjà fortement implantée et la société tunisienne se montre d’ailleurs plutôt conservatrice. Ce traditionalisme séculaire a été entretenu et consolidé par la dictature de Ben Ali qui, deux décennies durant, s’est attaché à tuer la vie culturelle, à dévaloriser l’enseignement, les examens et les diplômes.

Les islamistes veulent démontrer que l’islam est menacé. Je ne le crois pas, ou je crois plutôt qu’il n’est menacé que par ces nouveaux musulmans, par leur ignorance affichée, par leur refus de réfléchir et s’instruire. Persuadés qu’ils n’ont rien à apprendre qu’ils ne savent déjà, ils s’érigent en donneurs de leçons, en prédicateurs, usant du verbe, des menaces et des armes, pour islamiser un pays déjà musulman.
Les islamistes, à vrai dire, ne tentent pas d’islamiser la société. Ils savent bien qu’elle est musulmane – parfois même jusqu’au fanatisme et à la xénophobie. Mais ils s’appliquent à réduire les libertés, à uniformiser la société, à achever l’œuvre d’abêtissement que Ben Ali n’a pas eu le loisir d’achever.
La Tunisie fait piètre mine aujourd’hui. Le déclin de ses institutions apparaît au grand jour, avec pour signe le délabrement de ses rues, de ses édifices, de ses commerces et même l’accoutrement fantasque de ses hommes et de ses femmes.

Gravats et ordures ménagères souillent villes et villages, plages et campagnes de la Tunisie. Le pays croule sous le poids de ses déchets et  étouffe dans son air vicié. Y a-t-il un petit bout de terrain nu, un rond point ou un bas-côté ?  on le convertit aussitôt en décharge. Personne ne s’en offusque : on se contente de balayer devant sa porte. Là où s’amassent des monticules d’immondices, un cafetier dresse sa terrasse : la clientèle s’en accommode. On sirote son café, on fume son narguilé. La saleté, on ne la voit plus ; les odeurs nauséabondes, on ne les sent plus. Mouches et moustiques peuvent toujours tournoyer, on les chasse d’un revers de la main. Le Tunisien est conciliant et ce n’est pas une légende.

On s’habitue à tout, on s’accommode de tout mais il est  peu probable que  les Tunisiens plient devant la terreur et se résignent à n’être plus eux-mêmes.

Rabâa Ben Achour-Abdelkéfi
Tunis le 28/08/2012


* Tout au long de son mandat, 2000-2011, le  dernier bureau la ligue tunisienne des droits de l’homme a lutté pour la défense des islamistes.
* Le Sommet mondial sur la société de l’information (SMSI)  qui s’est déroulé à Tunis du 16 au 18 novembre 2005, a constitué l’événement majeur de l’année 2005. Inattendu et opportun en raison d’un contexte sociopolitique marqué par un verrouillage de l’information et des moyens de communication, il offrait aux autorités, la possibilité d’améliorer leur réputation et aux partis de l’opposition, comme à la société civile, celle de se faire entendre et de dénoncer, devant la presse et l’opinion internationales, les dérapages du régime de Ben Ali.
Le 18 octobre 20005, un mois seulement avant la tenue du sommet, des personnalités politiques de tout bord (de l’extrême gauche aux islamistes nahdaouis, nationalistes arabes en passant par les islamo-progressistes, indépendants) et certains défenseurs des droits humains, se constituent en force de pression politique, entament une grève de la faim et créent un événement qui frappe avec force la crédibilité déjà chancelante du régime de Ben Ali.
« Le Mouvement du 18 octobre, écrit, Vincent Geiser, rvèle qu’en Tunisie, les relations entre les militants et les responsables des différents courants idéologiques et politiques ont toujours été régulières grâce notamment à des lieux de débats et de luttes communs, tels que la LTDH qui, depuis plus de vingt ans, rassemble toutes les sensibilités du pays ou, plus récemment, le Conseil national pour les libertés en Tunisie (CNLT fondé en 1997). En somme, le Mouvement du 18 octobre n’est pas un "accident"  de l’histoire protestataire tunisienne mais bien le produit d’une longue habitude de "travail en commun" »

*** Cérémonie d’observation de la lune, le 28 e jour du mois de ramadhan, sous l’égide des autorités religieuses, permettant d’en déterminer la durée effective (29 ou 30 jours), de fixer la date de l’Aïd, et par conséquent la naissance du mois de chawwal.


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La Révolution Tunisienne


Exposé présenté le  11 février 2011

Je me permets de vous rappeler le cinquième principe de l’Alpina :

« Le Franc-Maçon suisse est fidèlement et entièrement dévoué à sa patrie. Il reconnaît comme un devoir sacré de défendre les libertés et l’indépendance de son pays ainsi que de contribuer à maintenir la paix intérieure.
Fidèle à la Tradition de l’Ordre, il s’emploie à faire respecter les droits de l’homme.
Chaque Maçon, en tant que citoyen, est moralement tenu, pour affirmer ses principes ma-çonniques, de s’intéresser aux affaires publiques. Il agit, selon ses convictions, pour le bien de la patrie. »
Nanti de deux nationalités, je vais vous parler de


CETTE NOUVELLE TUNISIE, SA SITUATION ACTUELLE, COMMENT SE PRESENTE-T-ELLE ?


Les journaux ont donné beaucoup de détails sur les évènements en Tunisie et actuellement au moyen Orient sous le titre « De Printemps Arabe ». M’éloignant des évènements du quo-tidien, je tiens à vous rappeler que les opposants ayant vécu 10 à 20 ans d’exil en pays dé-mocratiques sont de retour, leurs concepts se sont modifiés, dans un sens de pluralité, l’exil a fait mûrir les esprits, et toutes ces personnalités de différentes obédiences idéologiques se connaissent. Ils sont revenus au pays avec une première détermination, ne pas se faire con-fisquer cette liberté acquise par le sang du peuple dépossédé de son pays. Le soulèvement, remontant du Sud tunisien, fut attaqué et aggravé par une milice sniper engagé par Ben Ali escorté de voyous soudoyés, libérés des prisons pour accomplir des pillages. Vu l’antériorité de certains soulèvements écrasés par les armes, tous les Tunisiens étaient conscients d’un état de fait qui se déclenchera à une date imprévisible.
Plusieurs pays, sans les nommer, n’ont pu saisir le présent qui leur a échappé. Ils soutenaient à juste titre les dictatures, muraille protectrice contre un flux migratoire et le fanatisme religieux islamique, au détriment des Droits de l’Homme. Sans saisir la rapidité du temps, ils ont été confrontés aux contradictions de leurs stratégies. Ils concevaient la recherche d’une stabilité par l’oppression sous couvert d’un semblant démocratique. Cette logique politique à leurs yeux est compatible, car la stabilité du pays sous-développé passe par un totalitarisme emmiellé. Du moins, tolèrent-ils un sens d'ouverture qui leur soit profitable, autrement dit, l'aménagement des régimes et non le changement de régime ? Ils objectent toute liberté par peur qu’elle entraîne un bouleversement politique désavantageux à leur égard. Pire encore, ces puissances, ayant semé des dictatures dans le monde entier, prétendent enseigner ce qu’est la démocratie.
En Suisse comme dans le reste des pays d’Europe, la liberté et la démocratie font partie du lot quotidien. Leur valeur m'a fait ressentir une émotion bien différente à celle que je pos-sède, ici par accoutumance. Bien que je retourne régulièrement sur le sol natal, en remet-tant mes pieds au mois de janvier, j'ai perçu comme une nouvelle renaissance qui jaillissait de mon cœur. Cette nouvelle Tunisie est, depuis quelques semaines, en pleine lumière, sous le regard étonné et parfois admiratif du monde des médias. Tous les projecteurs sont bra-qués sur elle, l’information, dans sa rapidité, voire dans son instantanéité, s’est débâillonnée des censures et de la langue de bois.
Le mur de la peur n’est plus le rempart infranchissable, il a été bravé puis abattu. Il y a eu une révolte avant tout pour le respect, la dignité de l’individu, le désir d’être entendu, d’être traité correctement. Une poussé, un mouvement ultime séculaire a abattu « LE DICTATEUR ». Loin des militants du moment qui ont pour souci primordial leurs idéaux, la jeunesse a com-pris qu’elle devra se croiser, sans se combattre. L'étau, je le souhaite, sera certainement desserré. Tout retour à un régime autoritaire, quel qu'il soit, ne sera plus acceptable. Les Tunisiens dans leurs diversités et individualisme ne le permettront plus. Ils veulent aller plus loin, abattre les enceintes privilégiées, faire table rase de ses structures avilissantes, éloigner ceux et celles qui ont accepté cette dictature, écarter les Cassandre.
Le geste de Bouazizi a donné le départ de la première révolution civique et civilisée de l’histoire humaine. Il n’avait pas brandi une arme contre ses ennemis, il ne s’est pas fait ex-ploser au milieu d’une foule de gens pour les emmener dans l’au-delà avec lui. Non, rien de tout cela ! Il s’est juste contenté de mettre fin à sa vie en s’immolant par le feu le 17 dé-cembre 2010. Il restera à jamais le symbole d'une Révolution tunisienne éclairée, coura-geuse, historique et inédite. La révolution de tout un peuple stupéfiant tous les pays qui ne s’attendaient guère à un tel éveil et encore moins dans un pays hautement pacifiste. Une révolution sans commune mesure avec les précédents mouvements sociaux contestataires. Il a soudé et solidarisé le peuple par une force inexistante auparavant. Tout en restant témé-raire, ce peuple est resté pondéré. Il a donné une image de souplesse, d'adaptation et de sagesse qui poussent au dépassement. Toutefois, non loin de ce comportement, il faut mal-heureusement déplorer quelques règlements de comptes inévitables. Il est certain qu’un nouvel ordre social, intellectuel, moral, esthétique émergera et transcrira les premières nouvelles pages de sa révolution.
Une dictature qui se croyait et que l'on croyait solidement installée a été abattue en moins d'un mois. Ce qui vient de s'accomplir sous nos yeux a été réalisé à mains nues, c’est ce que l’on a appelé « LA REVOLUTION DU JASMIN » qui n’en est pas une et je lui préfère « LA REVOLUTION CITOYENNE » basée sur la recherche de la dignité, de la justice et de la liberté. Une partie dé-terminée de la jeunesse s'est soulevée spontanément, sans être encadrée par un chef, ni une organisation ou un parti. Elle a payé sa victoire par le sang, au prix à ce jour de 175 morts et deux fois plus de blessés atteints par balles tirées par les milices du Président déchu incarnant un régime liberticide et corrompu. Je vous rends attentif mes FF, l'événement que l'on a eu sous les yeux est une révolution, une vraie, pour ne pas dire un soulèvement. Même s'il y a eu, ici et là du feu et du sang, c’est une révolution pacifique, peu violente en comparaison aux révolutions classiques (repensons au sanguinaire Kadhafi et d’autres). Une révolution de la société civile et non de révolutionnaires enflammés, sans le moindre agenda politique radical. C’est un mélange d’idéalisme et de nationalisme, une affirmation du sens de la communauté et de la fraternité. Depuis le 14 janvier, ceux, qui se sont soulevés à partir du 17 décembre 2010 partant de Sidi Bouzide, savent que leur mission n'est pas terminée.
À son sujet, les paroles de tout homme politique trouveront des échos démesurés dans le monde démagogique, avec diverses interprétations. Comme j’espère que les lynchages mé-diatiques mal intentionnés, frôlant l’indécence, ne soient pas un genre de vérité populiste. On parle facilement d'invasion d'émigrés et du religieux, un lai motif savamment manipulé et inculqué par les dictateurs puis repris par des partis aux yeux éteints voulant revenir à l’âge de pierre.
La liberté d'expression qui n'a jamais existé depuis, plus de 130 ans, soit du 12 mai 1881 avec la signature du traité du Bardo au 14 janvier 2011 avec la fuite de Ben Ali, en réalité, elle n'a jamais était connu, et ce qu'elle veut dire exactement. Cinq à six générations successives ont subi depuis la colonisation jusqu’à ce jour l’oppression politique, l’exploitation économique et la misère sociale. Après tout cela, les Tunisiennes et Tunisiens s'en donnent à cœur joie, afin de s'assurer que tout cela n'est pas un trou dans l’eau. À charge pour nous, de ne pas se vanter d’avoir inventé l’eau chaude et pour eux de maintenir le cap, de ne pas se méprendre, de ne pas défoncer des portes ouvertes. Un nouvel ordre politique, une nouvelle constitution, une nouvelle déclaration des droits et des libertés feront avancer les choses. Après un colonialisme dénigrant et une dictature discréditant la personne humaine, le peuple vit sa deuxième indépendance. Elle ne doit pas devenir le prétexte à tous les « forcings », à tous les dépassements, à tous les abus, tout en gardant le sens des proportions sans les perdre, ni cédé aux illusions d'optiques, ni se tromper sur les rapports de force. Sa nouvelle liberté doit être l’écho d’une nation démocratique reconnue selon ses critères et ses valeurs culturelles. Il faut aider et préserver ce peuple des égarements et de se retenir de répondre à chaque aléa, sinon un risque court et transformera cette révolution en un événement cruel.
Comme vous l'eussiez constaté, le citoyen spectateur des situations antérieures a cédé sa place au citoyen acteur et s'est insurgé face aux obscénités révoltantes d'un dirigeant méga-lomane. Les révolutions ont toujours un côté sombre, l’esprit actuel du peuple est de voir clair en l’aidant à y voir plus clair. Le pouvoir souhaité doit être légitimé dans sa cohésion, dans son partage sans avantager ni une région ni une famille.
Une mise en place des commissions de surveillance, d'un contre-pouvoir ont pris leurs as-sises. Les mains qui mettront les bulletins dans les urnes seront accompagnées du cœur, de la mémoire et de l’histoire. Il se dégagera alors un consensus s'ordonnant dans le cadre d'un État séculier démocratique, avec un islam tolérant moderne tel qu’il le fut du VIII au XVII siècle, je l’espère. Sous nos yeux, cette première ébauche d’une démocratie naissante, non importée, dans le monde tunisien n’est plus un rêve. Il devient un rêve arabe qui se réalise et bouleversera les données géopolitiques méditerranéennes assez lentement malheureuse-ment. Il faut digérer tout cela.
Je désire terminer par ce qui suit, pour nous FM, de quelles manières entrevoir le volet hu-manitaire vis-à-vis de ces crises, le chômage, le mal-être des jeunes et sa démesure, le manque de sécurité, la lente progression du racisme, le discrédit généralisé du personnel politique (honnêteté, confiance et responsabilité) le libéralisme abattu par son arrogance. Premièrement présageons nos réflexions, à tous ces problèmes (le droit à la souveraineté, le droit d'ingérence et sa Loi sur les droits pour la protection des personnes mises en danger, les méfaits politiques et les perturbations naturelles). – Secundo, modernisons les vieilles démocraties tronquées et faisons face aux aspirations naissantes des nouvelles revendica-tions de libertés politiques de pensées et d’expressions. Puisqu'il semble qu'aucune solution n'ait été proposée à ce jour, une place merveilleuse nous est offerte sans la laisser tomber entre des mains d’opiniâtres énergumènes. Nos esprits non embourbés dans un ego pas-sionnel, nous permettrons de relever le défi, de régénérer une démocratie plus réelle, en propageant nos points de vue calqués sur nos principes et les confronter aux meilleurs pour une décence des attitudes, des mœurs, de l'agrément honnête de l'esprit attirant le respect de tout le monde.


Abdelhac BEGDI


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