Newsletter D&DS N° 7 - DIALOGUE & DEMOCRATIE SUISSE

Dialogue & Démocratie Suisse
Aller au contenu

Newsletter D&DS N° 7

Liens
Newsletter N° 7

La laïcité, une tolérance nécessaire

  
La franc-maçonnerie est une institution qui utilise la méthode initiatique par grade pour faire progresser ses membres vers le Juste et le Beau. Elle postule que la Bonté érigée en valeur sacerdotale peut transcender toutes les actions humaines volitives et affirme que les impétrants qui acceptent avec authenticité les arcanes de l'initiation dans le but sublime de reconstruire une nouvelle personnalité verront l'intelligence du cœur s'affirmer toujours plus dans la raison. Par l'acquisition d'une lumière graduellement plus vive, ils auront ainsi la possibilité d'aiguiser leur lucidité afin de rassembler ce qui est épars et d'être actif dans le grand chantier de la construction du Temple universel où en finalité règneront à la fois une justice respectueuse des libertés de croyance et de culture et une éthique ontologique, véritable garant d'un humanisme cosmopolite.
Dans le corpus de cette démarche initiatique propre à la maçonnerie spéculative est inclus implicitement l'acceptation d'un déterminisme principielle à croire que la recherche de la lumière par la méthode initiatique est la voie qui mène nécessairement à l'harmonie de soi-même et de la société en général. La confirmation de cette disposition est exprimée dans le rituel du premier grade de la loge Fidélité et Prudence lorsque le Vénérable communique
le mot de passe à l'impétrant comme suit: " ce mot hébreu signifie possession du monde et exprime symboliquement la volonté qu'ont les Francs-maçons d'assurer la force et la puissance de leur ordre dans toutes les parties de l'Univers  " Ce dessein universel et hégémonique respecte-t-il dans ses fondamentaux la laïcité ou au contraire recèle-t-il des éléments qui la violerait ? Nous répondrons à cette question plus loin. En attendant, poursuivons, si vous le voulez nos réflexions sur la laïcité proprement dite.
  
La définition de la laïcité a comme fondement le respect de l'homme dans son ensemble physique, moral, spirituel et philosophique et stipule que chaque être humain doit être libre de croire, de ne pas croire ou de douter. Nous pouvons ajouter aussi en citant Edgar Morin  " qu'elle est la rationalité critique et la pluralité opposées aux dogmes et au monopole de la vérité  ".
En conséquence la laïcité ne rejette et ne combat pas les religions, mais au contraire les accepte toutes.  Chacune d'elle peut donc exister, s'exprimer, et cohabiter. De même elle permet aussi l'agnosticisme, l'athéisme, le déisme et le théisme. Elle exclut tout privilège spécifiquement accordé aux religions et aux associations philosophiques qui par ailleurs ne peuvent ordonner des règles à leur bénéfice.
Ce qui pose problème à la laïcité c'est la captation du pouvoir politique par les institutions  religieuses, para religieuse et philosophiques.
Notons que dans ce rapport particulier de la religion avec l'état qui a existé en particulier sous l'ancien régime en France et jusqu'à la révolution française, la religion catholique a su imposer unilatéralement ses dogmes et son monopole de la vérité. Depuis la loi du 9 décembre 1905 dite " loi de séparation de l'église et de l'état "  la laïcisation de la société française est assurée puisque nulles religions ou sociétés philosophiques ne peuvent imposer de règles à leur profit.

Fondamentalement, la laïcité évoque la liberté de conscience et l'égalité entre les êtres humains. Elle refuse tous les dogmes astreignant à une croyance irrespectueuse de la liberté de conscience de chacun.
Elle est un idéal  qui permet à tous croyants et incroyants de vivre ensemble dans le respect des différences culturels, des sexes de la condition sociale et de la race. Nous ressentons bien qu'une telle exigence ne peut se réaliser par la force des convictions. Elle doit s'inscrire dans la constitution et les lois de tous les pays afin de contrer les inévitables corporatismes, communautarismes religieux et clientélisme d'affaire qui pourraient diviser le peuple en groupes de droit concurrent afin de favoriser une idéologie dominante.
Pour ne pas encourager ces déviances et leurs inévitables aliénations, il faut, autant que faire se peut, éviter de faire resurgir les démons du passé, en l'occurrence les religions de toutes natures, qui ont pendant des siècles imposés une morale autoritaire brimant la liberté, l'égalité et le libre arbitre. En conséquence, la laïcité doit s'inscrire en lettre de feu au cœur de la vie démocratique, c'est-à-dire dans la constitution et les lois pour arbitrer et  organiser le bien vivre ensemble des citoyens d'un pays.

C'est le 26 août 1789 à l'assemblée nationale française que les valeurs laïques sont inscrites pour la première dans un texte appelé : Déclaration des Droits de l'Homme et du Citoyen . Inspirée de la Déclaration de l'indépendance américaine de 1776 et de l'esprit philosophique du XVIIIe siècle, elle marque la fin de l'Ancien Régime et le début d'une ère nouvelle. C'est un texte majeur dans l'histoire de la pensée et de la liberté parce qu'elle a imposé l'idée d'universalité des droits de l'Homme.

En 1948, 58 états membres de l'Assemblée générale des Nations Unies  ont adopté la Déclaration universelle des droits de l'homme en vue de combattre l'oppression et la discrimination. Pour la première fois dans l'histoire de l'humanité, la communauté internationale a adopté un document considéré comme ayant une valeur universelle - "l'idéal commun à atteindre par tous les peuples et toutes les nations".
En lisant ces deux déclarations, nous sommes frappés de constater qu'elles s'inspirent pour le moins des fondamentaux constitutionnels d'un ordre maçonnique exception faite bien sûr de l'égalité des sexes et de la référence au GADLU. Mais pour le reste, l'esprit du texte des constitutions d'Anderson est respecté.

A titre d'exemple notons que l'esprit de l'article 4 du texte de 1789  qui stipule que " la liberté consiste à pouvoir faire tout ce qui ne nuit pas à autrui : ainsi, l'exercice des droits naturels de chaque homme n'a de bornes que celles qui assurent aux autres membres de la Société la jouissance de ces même droits. Ces bornes ne peuvent être déterminées que par la loi "  est exprimé dans une logique moralisatrice dans le rituel au 1er grade de la Loge Fidélité et Prudence  par deux maximes, la première : " fais pour les autres ce que tu voudrais qu'ils fissent pour toi mais ne fais pas à autrui ce que tu ne voudrais pas qu'il te fut fait " et la seconde : " garde jalousement l'indépendance de ta conscience et n'accepte aucune autre autorité que celle que t'impose ta raison ".

Il est hautement probable que les idéaux de la franc-maçonnerie étaient connus des membres qui ont participé à la rédaction de ces deux déclarations  voire même que certains d'entre eux étaient franc-maçon.
En définitive, l'idée fondamentale de la laïcité c'est l'affirmation,  selon Guylain Chevrier historien président du Conseil scientifique de l'UFAL  "  que ce qui nous fait égaux, la loi, la politique, la démocratie, constitutif d'une certaine idée de la Nation et de la République, sont au-dessus de ce qui nous différencie, les religions, les origines diverse, les cultures régionales, sans pour autant les mépriser, bien au contraire. "
Je souscris très volontiers à ce que dit Guylain Chevrier, car il est essentiel de hiérarchiser les valeurs démocratiques sous peine d'entretenir une confusion dans sa pratique.  La laïcité est en quelque sorte le GADLU de la vie en commun. Pris dans cet esprit ses vertus organisatrices sur conscientisées chez tous seront l'alpha et l'oméga d'une société où la liberté de conscience, le respect des différences de cultures, de sexes et d'éducation  permettront l'avènement d'une société multiculturels où règneront plus de justice et plus d'amour.

La franc-maçonnerie est laïque dans sa pratique et ses idéaux  puisqu'elle développe la liberté de conscience, la tolérance et souhaite que l'harmonie règne dans le cœur des hommes et par extension dans les lois qui régissent les sociétés. Elle se réfère à un GADLU, sorte de démiurge énergétique, non dogmatique, indéfinissable et personnel distillant la lumière et fécondant la conscience de tout initié qui s'affranchira des certitudes inutiles.
L'universalité du message maçonnique est garantie par la méthode initiatique qui puise ses racines dans la Tradition immémoriale où règne les archétypes qui structurent l'Unité de la vie. Rien dans cette méthode s'apparente à une quelconque autorité temporelle qui aliénerait la pensée. Au contraire, elle développe toute les vertus de la laïcité puisque le maçon accomplit est un homme libre, responsable, tolérant de la croyance d'autrui et respectant l'homme dans son ensemble physique, morale, spirituel et philosophique.

Finalement, à la question de savoir si la laïcité est compatible avec  " la volonté qu'ont les Francs-maçons d'assurer la force et la puissance de leur ordre dans toutes les parties de l'Univers ", je répondais que tant que l'organisation maçonnique poursuivra ce qu'elle est aujourd'hui c'est-à-dire d'être un ordre initiatique traditionnel dont la vocation est l'enrichissement des citoyens par le respect des libertés de conscience et par leur engagement dans les corps politiques de pays ayant ratifié la déclaration Universelle des Droits de l'homme de 1948, elle restera cet outil laïque indispensable d'amplification de la démocratie. Vouloir étendre cet outil dans toutes les parties de l'univers est à l'honneur de notre Ordre maçonnique puisque sa morale et son éthique laïques sont les fondements et les pierres angulaires de la démocratie d'aujourd'hui et de toujours.  

André Moser



Chantier sur la laïcité

Commission Ethique / Institution / Mandat N° 4/ Chantiers

Chantiers


Documents


La laïcité en Occident

La laïcité en Orient


Retourner au contenu