Mandat N° 2 - chantier - Déjeuner-débat du 08.09.2010. Ethique et Politique
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Babel, un avenir possible ? Ethique et politique.
Chers Amis
C'est un grand plaisir et un grand honneur d'être le premier à prendre la parole dans Dialogue et Démocratie Suisse.
Lorsque j'ai choisi de vous parler d'éthique et de politique, je ne m'étais pas rendu compte que j'abordais un sujet si difficile. Ce n'est que récemment que soudain je me suis dis, " Mais je vais être dans un cadre particulièrement agréable à la suite d'un repas tout aussi agréable, si je n'arrive pas à intéresser mes auditeurs le premier orateur de DDS risquera d'être aussi le dernier. " Je me suis dit alors que je dois tout faire pour rendrevraiment vivantecette conférence.
Au hasard, j'ai choisi une date sur un calendrier. Je suis tombé sur le 8 août. J'ai regardé sur internet quels événements se sont déroulés les 8 août au cours des siècles et quels étaient leur rapport à l'éthique et à la politique.
8 août 117 : L'empereur romain Trajan meurt, Adrien lui succède. Trajan était un empereur guerrier. Adrien un empereur pacifique, fin, cultivé, il était un homme très respectueux des cultures étrangères. Il avait dans l'idée d'établir un Empire universel, qui ne serait pas autoritaire.
8 août 1570 : Signature du traite de paix de Saint Germain-en-Laye, qui mit fin à la troisième guerre de religion.
8 août 1815 : Napoléon part à Saint-Hélène. La fin d'une tyrannie
8 août 1925 : Le Ku Klux Klan, organise son premier congrès. C'est la naissance d'une association fondée sur la haine, sur le sentiment de sa supériorité.
8 août 1940 : C'est le début de la bataille d'Angleterre, le début d'un combat titanesque qui mettra fin à autre tyrannie, la tyrannie nazie.
Je me suis engagé de vous parler d'éthique et de politique. Je viens de vous dire que ce n'est pas vraiment un sujet facile. Et de l'associer à l'histoire de la tour de Babel va nous engager sur un chemin ardu et passionnant.
Vous vous souvenez certainement que Coluche avait dit que Mitterrand et Giscard avaient divisé la France en deux, et que lui, il allait la plier en quatre.
Je ne vais pas vous plier en quatre. Le sujet qui va nous occuper m'en rend la tâche impossible. Mais je vais essayer de vous monter comment l'histoire de la Tour de Babel peut nous aider à comprendre quelque chose d'essentiel.
Je suis parti du postulat de la Bible. L'histoire de la tour de Babel est un mythe dont l'auteur a cherché à expliquer pourquoi l'humanité vivait divisée et en guerres perpétuelles. Il s'agit donc de comprendre ce mythe et de montrer en quoi son auteur a fait un grave erreur.
L'histoire de la tour de Babel est pour moi une vieille compagne. Elle me tourne dans la tête depuis bien des années. J'avais fini mes études et j'avais commencé d'imaginer une thèse de doctorat, car j'étais très intéressé par la théorie des conflits, la polémologie, dont le contraire est la théorie de la paix qui m'intéressait tout autant.
A cette époque, vous vous en souvenez, nous étions en pleine Guerre froide, avec la menace d'un holocauste nucléaire. Je me demandais ce que pourrait devenir l'humanité car je n'imaginais pas que nous puissions survivre si nous ne parvenions pas à nous unir et à vivre en paix. Or, il était impossible d'envisager l'unification du genre humain et, moins encore, un avenir paisible. C'était à l'époque où John Lennon proclamait son rêve de paix universelle. C'était une belle chanson, mais bien peu réaliste. Déjà dans les années soixante, la Terre était devenue un espace fort réduit. On parlait d'un village perdu dans l'univers au milieu de rien du tout. Déjà on pressentait les menaces d'une surpopulation, même si on ne voyait pas encore les risques de gravissimes pollutions. Je me souviens que déjà à cette époque Hubert Reeves avait écrit, dans un de ses ouvrages, que notre planète était infestée d'humains comme on pourrait dire d'une mer qu'elle était infestée de requins.
C'est au cours d'une de ces journée faites de réflexion, que l'histoire de la Tour de Babel m'était revenue à l'esprit. Il était dit, dans la Genèse, qu'au début, tous les hommes vivaient unis, en paix et qu'ils parlaient le même langage. Ils étaient donc dans une situation politique qui ressemblait à celle à laquelle nous devrions accéder.
Mais voilà, l'auteur du mythe prétendit qu'ils firent l'erreur de vouloir sceller leur amitié et leur unité afin que rien ne puisse jamais les dispercer sur la face de la terre. Ils décidèrent de construire une ville et une tour. Pouvait-on le leur reprocher ? Et pourtant, Dieu qui était descendu sur terre pour se rendre compte de leur ouvrage, prit fort mal la chose. Il décida de disperser les hommes sur la surface de la Terre et de leur imposer des langages différents, afin qu'ils ne se comprennent plus. Et depuis les hommes, rassemblés en multiples clans et tribus, n'ont cessé de se chamailler, de se faire la guerre, de se piller les uns les autres et de se haïr. C'est ainsi qu'à partir de ce jour les guerres eurent pour usage de rééquilibrer les pressions démographiques. C'est du moins ce que prétendent certains polémologues. Pour eux, faire la guerre serait devenu un moyen pour ne pas mourir de faim.
Et voici ce qu'il se passa. Au fil des siècles et des millénaires la puissance des hommes s'est accrue. Et depuis de XVIIIe siècle, elle s'est accrue dans des proportions démesurées. Si bien qu'aujourd'hui, il nous serait désormais facile de détruire la planète, de détruire l'humanité entière et même la vie.
La situation semble à ce point dangereuse que nous entendons parfois certains de nos contemporains se demander si les hommes ne seraient pas tout simplement une erreur de la nature. Nous sommes intelligents, certes, mais pas assez. Peut-être, au fond, la Nature a-t-il choisi ce moyen curieux pour se débarrasser d'une humanité décidément trop sotte. Peut-être est-ce la seule possibilité qu'elle aurait trouvé pour protéger ?
Les mythes bibliques nous ont montré que Dieu pouvait être indifférent aux hommes et pouvait les laisser se diriger tout droit vers un désastre, qu'Il pouvait être désireux de les détruire par un accident qu'ils auraient eux-mêmes provoqué, qu'Il pouvait être profondément injuste, Lui qui avait déjà détruit l'humanité lors du Déluge parce qu'Il la voyait consacrée au mal ? N'avait-Il pas désiré alors la détruire afin qu'une nouvelle race d'homme améliorée apparaisse sur terre ? Mais comment pouvait-Il espérer maintenant que l'humanité s'améliore, alors qu'après Babel, c'est lui qui l'avait divisée, la contraignant ainsi à se détester et à se faire la guerre ?
Voilà donc le problème auquel je nous voyais confrontés : J'avais la certitude que nous devions nous unir et avoir du respect les uns pour les autres, afin que nous évitions de nous détruire, nous qui possédions désormais une puissance démesurée. Mais le souvenir de Babel semblerait nous indiquer que nous ne pouvions pas nous unir paisiblement. Que nous ne pouvions pas parler un langage commun. La nature humaine serait-elle frappée d'une tare, d'un vice de forme qui nous condamnerait à disparaître ?
Je nous voyais pris dans une contradiction insoluble, et je nous voyais inévitablement condamnés. Mais je voulais comprendre pourquoi l'humanité semblait condamnée à être divisée et à être incapable de parler un langage commun. L'explication que donne la Bible est plutôt sommaire. Il est écrit ceci : " Voici, ils forment un seul peuple et ils ont tous une même langue, et c'est là ce qu'ils ont entrepris; maintenant rien ne les empêcherait de faire tout ce qu'il aurait projeté. " Cette affirmation ne paraît pas, a priori, très satisfaisante, car elle est vraiment trop sommaire. N'est-il pas dit que Dieu a fait l'homme à son image, n'a-t-Il pas fait de lui un créateur, un visionnaire ? Sa nature n'est-elle pas de faire ce qu'il désire ?
Le postulat de la liberté
Je pense, en toute humilité, que si nous voulons comprendre quelque chose de l'histoire de l'humanité, nous devons partir d'un postulat. D'un postulat très simple : Dieu, ou le Grand Architecte de l'Univers, a voulu l'homme libre. Et comment aurait-il pu en être autrement ? Si nous n'étions pas libres, nul n'aurait pu prétendre que nous sommes des pêcheurs. Nul n'aurait pu affirmer que nous sommes des êtres condamnables pour les choix que nous ferions ! Si nous étions tel des insectes entièrement déterminés par nos gènes, par nos instincts, nous ne pourrions jamais être confrontés à la nécessité de choisir entre le bien et le mal. Nous ne saurions pas ce que sont le bien et le mal. Nous ne pourrions pas tomber dans la tentation car nous n'agirions que de façon automatique.
Dieu aurait voulu créer l'homme a son image. Il l'aurait voulu créatif et entreprenant. Il nous aurait voulu intelligent. Il nous a voulu capable de choisir entre le bien et le mal.
Mais si Dieu a voulu que nous soyons libres de choisir entre le Bien et le Mal, cela veut dire qu'il nous a interdit aussi de nous soumettre à des autorités qui choisiraient pour nous, et qui nous imposeraient d'agir comme comme bon leur semblerait. Si notre chef de l'Etat, ou simplement notre maire, nous dicte ce que nous devons faire, sans que nous puissions donner notre avis au moyen d'un référendum, par exemple, il me semble qu'il y a clairement abus de pouvoir. C'est dire que si Dieu nous a voulu libre, aucune autorité, aucun homme n'a le droit de s'imposer à nous, et de choisir à notre place notre propre destin.
Et qu'on ne nous dise pas que c'est impossible.
La Suisse reconnait au peuple la possibilité de donner son avis ! Et c'est l'un des pays les plus prospères au monde. A l'inverse, regardez les institutions européennes de quelle manière elles décident ce qui est bon pour les Européens, avec un minimum de contrôle démocratique. Et puisqu'elles ne leur offre aucun moyen de donner leur avis, ils sont dans une situation qui va contre la volonté de Dieu, puisque Dieu nous veut libres, ou le Grand Archtichte.
Le postulat de la liberté est à la racine de la démocratie : l'homme est maître de son destin, il a le loisir de s'unir avec d'autres hommes afin de réaliser avec eux des projets. Or, en réalité, durant des millénaires toute l'humanité a été dominée par des classes guerrières, et a été incapable de choisir son destin, parce qu'elle était constamment en opposition avec elle-même et dans l'obligation de se faire la guerre. Et pour se faire la guerre, elle s'est constamment dotée de moyens techniques qui l'a rendaient plus puissante.
Permettez-moi de vous expliquer.
Les civilisations qui ont précédé le monde moderne ont toujours reposé sur des techniques bien identifiées et stables, mais qui évoluaient par bonds successifs : il y a eu d'abord les techniques de la pierre taillée. Dès l'instant que les hommes ont appris à utiliser des pierres comme instruments, ils sont devenus puissants dans le règne animal. Puis il créa les techniques de la pierre polie. C'est à cette époque que nos ancêtres ont inventé l'élevage et l'agriculture. Ils ont considérablement accru leur pouvoir sur la nature. A partir du néolithique moyen, ils se sont vus contraints de s'armer pour se défendre contre leurs voisins, voire pour conquérir des territoires plus vastes. Puis, un beau jour, ils ont inventé la métallurgie. Là, ils ont fait un véritable bond. Ce furent d'abord les techniques du cuivre, puis celles du bronze. Des Etats ont été constitués, imposant leur autorité sur des territoires vastes comme l'Egypte, ou comme l'Irak. Puis apparurent les techniques du fer, qui ont renforcé encore d'avantage les sociétés humaines. Les guerres étaient de plus en plus dévastatrices et plus en plus fréquentes. De vastes empires ont été bâtis dans des conflits gigantesques, comme l'Empire hellénistique, ou comme l'Empire romain, ou l'Empire chinois, ou l'Empire mongol.
Jusqu'à ce jour, durant ces longues périodes, la liberté n'a jamais vraiment été possible, sauf en de très rares occasions, comme par exemple au temps de la Grèce classique. Puisque la guerre était quasiment constante, la liberté de pensée, la liberté de parole, la liberté de réunion, la liberté contre le peur, ne pouvaient pas exister, car toutes ces sociétés étaient tendues par la nécessité d'être soumise à une autorité. Constamment elles devaient tenir le peuple pour se défendre, constamment il fallait accroître son territoire si l'on ne voulait pas être un jour vaincu et submergé.
Dieu nous a voulu libres. Mais qu'est-ce que la liberté ?
Et pourtant Dieu nous a voulu libres, puisque nous sommes pécheurs, puisque nous pouvons choisir la voie du bien ou celle du mal. Mais la nécessité de la guerre nous a privé de liberté, jusqu'à l'apparition de cette nouvelle ère que l'on appelle la " Modernité " et qui est en réalité un tout nouveau type de civilisation, infiniment plus puissante que celles que l'on a connu jusqu'à présent, la civilisation scientifique. Là, soudain, il semble que la liberté soit devenue possible.
Mais qu'est-ce que la liberté ? Ça ne peut pas être " faire n'importe quoi ", car faire n'importe quoi serait s'engager indifféremment dans la voie du bien ou dans celle du mal. Or, au moment où il est dit que Dieu est descendu sur terre pour voir le travail des hommes de Babel, Il affirme qu'il ne pouvait certainement pas les laisser " faire tout ce qu'ils auraient projeté de faire ". Et c'est alors qu'Il les aurait dispersé sur la surface de la terre.
Mais alors qu'est-ce que c'est qu'être libre ?
J'ai la chance d'être bi-national. Je suis né en France, pendant la guerre, de parents suisses. Cela me donne la possibilité d'être à la fois acteur et spectateur dans deux pays différents. En France, certains aiment la Suisse et l'envient, d'autres la détestent. Cela n'est pas très important. Ce qui est important, en revanche, c'est de constater que la Suisse a certainement les institutions les plus démocratiques au monde. Pourquoi ? Parce que le peuple suisse est le souverain. C'est lui qui décide en dernier recours. Le chef de l'Etat, lui, n'est certainement pas le souverain. Mais il est l'expression de toutes les raisons positives que les Suisses ont de vivre ensembles. La Suisse est composée de 26 Etats, tous plus jaloux de leurs prérogatives les uns que les autres. On y parle quatre langues différentes, et les religions ont souvent été des raisons de s'affronter, voir même de se faire la guerre, jusqu'au XIX siècle. Bref, la Suisse est une Europe en miniature.
Vous le savez, j'ai été élu député à l'Assemblée constituante. Genève est une minuscule République. Elle fait 450 kilomètres carrés, elle est peuplée de 480 000 habitants, dont la moitié est constituée d'étrangers. C'est une république confetti, mais une vraie république. Le peuple souverain a décidé, il y a deux ans, de changer sa constitution, qui datait de 1847. Elle était devenue totalement obsolète. Nous étions 80 députés de tous les horizons politiques à avoir été élus à être installés devant une page blanche qui devait devenir la nouvelle constitution. Alors que je regardais cette assemblée, il m'est apparu clairement que si nous voulions réussir dans notre tâche nous devions éviter deux écueils. En premier lieu, nous devions éviter d'être agressifs les uns envers les autres, de nous invectiver sans nous écouter, et nous devions être attentifs aux propositions que les uns et des autres auraient à faire, quelque soit leur parti. Deuxièmement, nous devions nous engager. Quelles que soient nos connaissances du droit constitutionnel, nous devions faire des propositions. Nous ne pouvions pas nous laisser aller à notre paresse naturelle et regarder les autres faire le travail pour nous. Nous ne pouvions pas nous abandonner au laxisme.
C'est ainsi que j'ai compris ce qu'était la liberté. Nous ne faisons partie du peuple souverain que si, d'une part nous ne nous livrons pas à la violence et que nous sommes attentifs les uns aux autres, et si, d'autre part, nous nous engagions à travailler avec tous nos moyens personnels à la vie de la communauté.
La liberté n'est donc pas quelque chose de simple : elle repose sur des contraintes.
Vous allez me dire " qu'est-ce qu'il nous raconte. Il veut nous faire croire que pour être libre il faut se contraindre. "
Et pourtant, c'est bien de cela qu'il s'agit. Je vais vous donner un exemple : Si je veux apprendre à piloter un avion, je dois me contraindre à apprendre les techniques de l'aéronautique et de l'aérodynamique, je dois me concentrer pour maîtriser mes gestes et mes comportements dans un espace à trois dimensions. Alors seulement je pourrais jouir de la liberté de me déplacer et de voler. Si l'enfant veut apprendre à parler, il doit abandonner ses cris et ses grognements pour construire des sons articulés. Il doit se contraindre à structurer ses sons. C'est à cette seule condition qu'il pourra être libre de s'exprimer et de se faire comprendre.
La liberté repose donc sur un postulat objectif : nous n'avons pas le droit de restreindre notre nature, mais nous devons abandonner la violence et le laxisme afin d'être capables de structurer nos comportements pour atteindre les objectifs que nous avons décidé d'atteindre. En dehors de ces deux contraintes, nul ne peut limiter, par principe, la nature humaine. Nul ne peut limiter les talents des hommes.
On comprend qu'il est difficile de définir positivement la liberté car il s'agirait d'englober la totalité de la nature humaine, et que nous sommes bien incapables de définir cette nature humaine. Une définition de la liberté devrait englober la totalité de la nature humaine, mais elle devrait simultanément rejeter ce qui, dans les actions et les choix humains, limiteraient nécessairement les potentialités de cette nature.
Or, ce qui limite les potentialités de la nature humaine, ce sont donc deux choses :
a. Le recours à la violence, qui oblige de consacrer sa vie aux seuls instincts d'agression et de défense, qui ne voit de justice que dans la vendetta et qui ne peut se soumettre à aucun système de droit objectif. C'est le recours à la violence qui a constamment privé les hommes de liberté au cours des millénaires.
b. Le laxisme dans la conduite de sa vie, qui ne permet la structuration d'aucun comportement créateur.
La liberté c'est donc se soumettre à certaines contraintes. Par exemple, elle ne s'accorde pas à certaines doctrines très à la mode aujourd'hui qui prétendent qu'une personnalité libre se forme dans le respect fétichiste des pulsions de l'enfant, c'est-à-dire, dans son agressivité et dans son incapacité de se maîtriser lui-même.
Par conséquent, la liberté se définit comme l'acceptation pleine et entière de la nature humaine à l'exclusion de ce qui, dans l'expression désordonnée de cette nature, a pour effet d'en limiter les potentialités.
Ouf ! Vous avez compris ?
La nature humaine est pleine de potentialité et elle est pleine de contradictions. Et nous passons notre temps à en découvrir de nouvelles... Donc accepter la nature humaine, ce ne peut être empêcher que se déploient certains aspects de cette nature. Evidemment, c'est pas tout simple, mais nous ne pouvons pas progresser sans avoir ce point de repère.
La liberté est un idéal qui se situe au point de rencontre de toutes les contradictions de la nature humaine. Mais c'est aussi un idéal qui rassemble tous les hommes et toutes les femmes autour d'un même drame et d'une même grandeur : la reconnaissance que notre vie est limitée, qu'elle est en proie au deuil et au malheur, mais en même temps qu'elle nous offre la conscience de l'univers.
Il existe une troisième chose dont la liberté doit limiter la nature humaine : la volonté d'imposer à autrui nos propres certitudes. Nous pouvons chercher à convaincre, mais nous ne pouvons contraindre, même si nous sommes certains d'avoir raison.
Or, les hommes ont constamment voulu imposer à leurs contemporains leurs certitudes vraies ou fausses qu'ils présentaient comme des idéaux universels.
La liberté n'est donc pas quelque chose de simple, c'est quelque chose qui nous impose de nous tenir droit. La liberté n'est pas de faire tout ce qui nous passe par la tête, et de prétendre qu'un acte de violence est la preuve de notre liberté. Ou que notre paresse est la preuve de notre liberté.
La violence et le laxisme sont à l'origine de la tyrannie et de l'anarchie.
L'individu et la société
Cette façon qui nous oblige à nous tenir droit a pour effet de maintenir un équilibre entre l'individu et la société. L'anarchie, est la conséquence du mépris de la société par les individus ; et la tyrannie, est la conséquence du mépris des individus par les autorités sociales.
Qu'une autorité sociale ou politique exige de chacun de nous une obéissance absolue, et la société écrase l'individu, elle détruit l'essence même de son propre dynamisme. A l'inverse, qu'un individu qui se laisse dominer par ses propres pulsions, son avidité, sa rapacité ou sa violence, et qu'il cherche à soumettre le monde à ses excès, et l'individu mine la société.
Au fond, n'est-ce pas cela l'histoire de la Tour de Babel ? Cette histoire de la Genèse part d'un état de la société qui commence par la liberté. Puis quelque chose se brise. Soudain, la société impose à tous ses membres la quête d'un objectif unique. Tous doivent de participer à la construction d'une monumentale création architecturale. Cette société, qui était universelle, choisit de créer une tour et une ville afin de que rien ne puisse jamais la diviser. Mais elle fit perdre la liberté à ses membres, puisqu'ils étaient contraints de se consacrer exclusivement à la fabrication de cette Tour.
Mais alors, est-il vraiment juste de nous demander si c'est Dieu qui imposait aux hommes d'être dispersés sur la surface de la terre et de ne plus parler un langage commun ? Ne serait-ce pas plutôt la responsabilité des hommes qui, ayant choisi d'abandonner leur liberté, se seraient finalement opposés les uns les autres, perdant leur capacité de se comprendre ?
A bien y réfléchir, la tragédie de Babel est similaire à bien d'autres tragédies de l'histoire de l'humanité. Par exemple, la civilisation de l'île de Pâques. Les Pascuans n'ont-ils pas consacré, un beau jour, toute leur énergie à l'élaboration de ces statues gigantesques, les Moais, pour des raisons que l'on ignore, mais qui eurent pour conséquence la déforestation et la destruction de leur île, la famine et la guerre civile ?
Ne serait-ce pas la même histoire que celle de la Chine à l'époque des Royaumes combattants ?
QínSh?Huáng est le premier unificateur de l'empire chinois.Or, afin de maintenir son peuple dans l'ordre le plus stricte, il le força à construire la Grande Muraille de Chine pour le maintenir dans une servitude qui devait les empêcher à jamais de se révolter et de se diviser. La conséquence c'est qu'il se révolta et se divisa, et que le pays plongea dans la guerre civile.
Et qu'en est-il de l'Egypte antique ? L'ancienne empire, après avoir construit des œuvres gigantesques, comme les pyramides de Saqqarah ou celles de Gizeh, s'effondre au environ 2200 avant notre ère, dans l'anarchie et la guerre civile.
Et qu'en est-il encore de la civilisation communiste ? Elle reposa sur une théorie sociale qui était présentée comme un absolu, et que nul ne pouvait discuter et moins encore critiquer. Ce système intellectuel qui avait l'intention de dominer l'intelligence humaine ruina l'Empire qui dura moins d'un siècle et qui s'effondra.
On entend souvent dire, notamment des Chinois, que la liberté va nous diviser et nous conduire à la guerre civile. C'est le contraire qui se passe. C'est lorsque nous perdons notre liberté que nous nous engageons sur la voie de la guerre civile. Dès l'instant que nous nous imposons une philosophie unique, ou l'accomplissement d'une œuvre unique, nous perdons notre liberté et nous nous engageons sur les sentiers de la guerre.
La liberté ne dresse pas l'homme contre lui-même, l'humanité contre elle-même. Elle ne nous divise pas parce qu'elle nous permet d'embrasser toutes les potentialités de la nature humaine.
La liberté nous accorde la possibilité de choisir notre destin, de vivre nos rêves comme nous l'entendons, de proclamer nos idées et nos convictions sans que quiconque puisse s'en offusquer. Elle nous impose symétriquement de respecter les modes de vie et de pensée qui ne sont pas les nôtres. Elle nous donne des droits en même temps qu'elle nous impose des devoirs, de sorte qu'elle ne va pas sans la responsabilité : nous sommes tenus de reconnaître nos limites et d'assumer les conséquences de nos choix.
Négativement, on peut dire de la liberté qu'elle ne nous accorde pas la possibilité de nous soumettre à nos pulsions, à nos instincts ou à notre violence naturelle (comme l'affirment tous ceux, et ils sont nombreux, qui pensent que nous ne sommes rien de plus que des animaux régis par les seules lois de la biologie), elle ne nous permet pas davantage d'abandonner notre libre-arbitre à des dogmatismes que l'on ne saurait critiquer (comme le font les islamistes) ou à des théories sociales que l'on ne pourrait pas discuter (comme l'ont fait les marxistes). De telles soumissions nient la liberté et nous reconduisent immanquablement au drame de Babel, car ces constructions intellectuelles qui veulent s'imposer comme des absolus conduisent au même désastre que Babel.
En revanche, la liberté nous convie au respect des faits et des points de vue ; elle nous oblige à la tolérance et au débat d'idées.
Voilà pourquoi la démocratie est supérieure à tous les autres systèmes politiques : elle seule peut faire place à l'infinie diversité de la nature humaine. Elle ne conduit ni à l'anarchie ni à la tyrannie si les hommes savent se tenir droits et se respecter. S'ils s'imposent de lutter contre leurs propres excès. La démocratie lutte simultanément contre ceux qui croient posséder la Vérité absolue, et contre ceux qui pensent qu'il est inutile de la rechercher.
Dieu a créé l'homme a son image. Il nous veut libres et non pas dominés par une volonté qui forcerait à chacun d'ignorer tout autre choix que celui qui nous est imposé, par des mensonges.
La liberté a pour fondement l'éthique
Jusqu'à présent je n'ai parlé que de liberté, alors que je m'étais engagé à vous parler d'éthique. Et bien rassurez-vous, c'est pratiquement la même chose. Et j'ai tenté de vous monter que la liberté repose sur des contraintes.
Donc la liberté repose sur quelque chose qui nous dépasse et qui nous contraint : ce quelque chose, c'est l'éthique.
Je ne sais plus qui disait que " Les milieux autorisés sont ceux qui s'autorisent à penser qu'ils sont autorisés. " C'est apparemment drôle, mais en réalité cela dénonce un grave déséquilibre. Certaines personnes considèrent qu'elles sont très largement au-dessus de l'humanité commune, et qu'elles ont le droit de diriger et de commander sans que le peuple n'est rien à y redire. C'est contraire à l'éthique. Et pourtant, on en voit de ces hommes, et de ces femmes aussi, qui jouissent de leur pouvoir.
L'éthique s'impose à nous. Elle est notre propre volonté de nous tenir droits, d'être fiers et sans être orgueilleux.
Elle nous force à accepter toutes les contradictions de la nature humaine, à reconnaître que nous disposons d'une conscience et d'une intelligence qui nous élèvent au-dessus de tout ce qui existe dans la nature, et qui par conséquent nous forcent à la protéger. C'est pour cela que nous devons nous respecter : chacun dispose de la même grandeur, chacun a reçu une étincelle, une part de l'étincelle divine. C'est pour cela que nous devons être équitables dans nos relations avec autrui.
L'éthique c'est de nous respecter mutuellement, et c'est respecter la nature. J'étais récemment dans un magasin Leclerc, l'autre côté de la frontière. Dans le rayon poissons il y avait, figurez-vous, du thon rouge. Alors que nous savons tous que c'est une espèce en voie de disparition. Leclerc n'a pas fait preuve de son sens de l'éthique. Et qu'en est-il lorsque les éleveurs de porcs polluent les nappes phréatiques, les cours d'eau jusqu'à la mer. Ont-il le sens de l'éthique ? Et lorsqu'un automobiliste laisse tourner son moteur alors qu'il discute avec une connaissance et pollue inutilement, a-t-il le sens de l'éthique ? Tous ces gens sont-ils des hommes libres ? Ne sont-ils dominés par leur rapacité, leurs instincts, leur mépris ?
Seuls de l'éthique découle naturellement, la liberté, la tolérance, le dialogue, la collaboration, l'échange. C'est de l'éthique qu'émerge ce que les sociologues appellent le " capital social ", c'est-à-dire la confiance et la réciprocité qui sont au fondement d'une société vivante. Lorsque l'on n'est plus capable de constituer du " capital social ", c'est-à-dire de vivre selon l'éthique, nous nous dirigeons vers le modèle des sociétés maffieuses, et nous commençons de sombrer dans la misère et le sous-développement.
Nos systèmes politiques, en Occident, prétendent faire de la personne humaine le principe organisateur de la société. C'est ainsi qu'ils doivent avoir l'éthique pour fondement. Il ne peut pas en être autrement, car si l'on imposait à l'individu une morale, un ordre, ce ne serait plus lui le centre de la société, mais l'autorité de laquelle émanerait la morale qu'on lui impose. Que l'éthique fonde nos sociétés démocratiques, implique qu'elle doit être à l'origine de notre organisation politique et que si on en perd le sens, nous commençons tout simplement de sombrer.
Au XVI siècle vécu, en Allemagne, un philosophe et théologien calviniste nommé Althusius. On le reconnaît aujourd'hui comme le père du fédéralisme moderne et du principe de la souveraineté populaire. Dans un de ses ouvrages, il avait proposé un organigramme dans lequel l'institution politique comprenait un pouvoir législatif, un pouvoir exécutif et un pouvoir judiciaire. Deux siècles plus tard, Montesquieu fera la théorie complète de la séparation des trois pouvoirs, qui est l'un des piliers de la démocratie. Un pilier qui est respecté un Suisse mais qui, hélas, ne l'est pas vraiment dans certains pays européens.
L'idée à l'origine de ce système est que, lorsque les hommes se rencontrent dans le respect de l'éthique, ils s'organisent spontanément selon un système composé de trois piliers qui s'équilibrent les uns les autres. Pourquoi ?
Pour une raison fort simple.
Lorsque deux individualités se rencontrent, leur première réaction, c'est la méfiance. On ne sait pas qui est l'autre, on ne sait pas quelles sont ses intentions, il est possible qu'il cherche à nous nuire. Mais, même si les hommes sont antagonistes par nature, ils peuvent reconnaître qu'ils sont faibles, que leur vision des choses est unilatérale, qu'ils sont incapables de réaliser seuls leurs désirs et leurs rêves ; lorsque ces deux individus se rencontrent, et qu'ils décident de communiquer, d'échanger, de dialoguer, dès lors qu'ils veulent instaurer entre eux un rapport de confiance afin de réaliser ensemble un bénéfice qu'ils seraient incapables d'obtenir seuls, ils ne sont plus deux mais trois : les deux personnes qui d'une certaine façon s'excluent et s'opposent, et le principe de l'unité qui les rassemble, pour qu'ensemble elles collaborent à la réalisation de buts communs.
Et quel est le principe de cette unité ?
C'est l'éthique : c'est-à-dire le respect de l'autre dans son imprescriptible individualité, mais aussi le respect de nous-mêmes dans notre dignité. C'est la certitude qu'ensembles nous sommes bien plus que la somme de nos qualités. L'éthique nous impose, en premier lieu, la confrontation pacifique de nos points de vue, elle nous donne ensuite les moyens de réduire nos différents jusqu'au point ou une action commune devient possible, une action dont les bénéfices seront équitablement partagés. Elle permet enfin, en cas de différents lors de l'application des décisions, d'aplanir les éventuelles disputes avant qu'elles conduisent à une rupture.
Entre deux personnes donc, les trois instances, qu'Althusius avait repéré au niveau de l'Etat, sont présentes : le moment où l'on discute de l'objectif que l'on veut atteindre et où l'on décide, correspond à l'instance législative. Par exemple, si l'on veut construire un pont, on discute longuement avant de commencer les travaux. Le moment où l'on agit correspond à l'instance exécutive ; le moment où l'on règle un différent, à l'instance judiciaire. Ces trois moments, comme les trois pouvoirs, doivent être clairement séparés. Si l'on discute encore de ce que l'on va faire, alors que le moment d'agir est venu, le projet s'enlise. Lorsque la décision est prise, on doit s'abstenir de remettre en cause la chose acceptée ; mais si une dispute survient, tout doit être arrêté afin de ne pas compromettre l'œuvre à accomplir. On voit donc bien que ces trois instances doivent être clairement séparées.
Il en va de même lorsque l'on passe des individus aux groupes, puis des groupes aux groupements de groupes, puis à l'Etat, et puis même au groupement d'un certain nombre d'Etats dans une entité régionale, comme l'Union européenne. Il en irait de même, enfin, si l'on envisageait l'unité la plus vaste que l'on puisse imaginer, l'universalité humaine. Cependant, entre la rencontre de deux individus et la constitution de groupes de plus en plus importants, il s'avérera le plus souvent utile de codifier les règles qui président à leur unité. Cette codification ne remplace pas l'éthique, elle en précise les modalités dans le fonctionnement de ce groupe particulier.
On dotera un Etat d'une constitution. On dotera un groupement d'Etat d'une autre constitution. De façon stupide, la classe politique européenne ne veut pas entendre parler d'une constitution européenne; elle veut un traité. En tout état de cause, on doit savoir qu'une constitution ne remplace pas l'éthique : elle organise les trois pouvoirs législatif, exécutif et judiciaire, elle édicte les principes dont s'inspirent la vie communautaire, elle établit les règles qui permettent le dialogue entre les points de vue qui s'affrontent, entre les méthodes selon lesquelles les décisions sont exécutées, et formalise les moyens qui permettent de résoudre les conflits.
La doctrine politique française affirme avec force que l'éthique n'a rien à voir avec la gestion de l'Etat. Or, si la France est une démocratie, l'éthique est à son fondement, ou alors nous avons affaire à une parodie de démocratie. Selon cette doctrine, seule compterait en définitive la survie de l'Etat et celle-ci devrait être assurée par tous les moyens possibles, y compris, si nécessaire, les plus inacceptables. C'est ainsi que l'histoire récente de ce pays est pleine de dérives " barbouzes ". Souvenons-nous de ces " Cellules antiterroristes " qui furent mises au service des intérêts privés d'un seul individu. Il semble même qu'il y eut des meurtres politiques, jamais élucidés, des collusions entre intérêts publics et intérêts privés, voire des conduites maffieuses. On de souvient de la mort de Coluche. Il s'était présenté à l'élection présidentielle. Les sondages montraient qu'il pouvait obtenir la majorité et qu'il était en train de déstabiliser tout le système. On l'a prié de se retirer, on l'a menacé. Et on l'a retrouvé mort... Cela ne veut pas dire, bien sûr, qu'il ait été assassiné. Mais disait-il, "Y'a un truc qu'on est sûr quand on est ministre, c'est qu'on retournera pas à l'école, tandis qu'en prison, faut voir !".
Lorsque la politique est pervertie par certains de ses acteurs, c'est tout le système démocratique qui se dégrade. Lorsque certains politiciens se croient permis d'abuser de leur pouvoir, de s'adonner à l'autoritarisme, ou au népotisme, le peuple finit par ne plus croire en la politique, car il a compris que ce n'est plus la personne humaine qui est au centre de la société, mais l'élu, le puissant. Le peuple sent qu'il est méprisé. Lorsque l'on nie que l'éthique est à la racine de l'ensemble de la société et que l'on affirme que le " Secret défense " est indispensable à la défense de l'Etat et qu'on ne lui impose aucun frein juridique, nous ne sommes plus véritablement dans une démocratie.
Pour ma part, je considère qu'un Etat qui abandonne les règles de l'éthique dans la gestion de ses affaires ne mérite tout simplement pas de survivre. Je considère qu'un peuple qui ne réagit plus aux dérives de ses dirigeants, laisse son avenir lui échapper.
Alors qu'en est-il de Babel
Qu'en est-il finalement du mythe de Babel ? Cette humanité unifiée, paisible, qui avait abandonné sa liberté pour se consacrer à un seul objectif, la construction d'une ville et d'une tour. Il en est de même chaque fois que nous nous imposons à nous-même un système de pensée unique telle que fut la scolastique, ou un système de vérité absolue; il en est de même chaque fois que nous cessons de nous écouter, d'être attentifs à nos désirs, à nos rêves, à nos ambitions, à nos systèmes de pensée, à nos talents, et que nous nous mettons à cuire des millions de briques et à les empiler indéfiniment. Il en est de même lorsque nous nous laissons imposer par une autorité une morale qui nous contraint de chercher à d'atteindre un objectif unique.
Voilà, peut-être, pourquoi Dieu s'est fâché. Les hommes se sont détournés de l'éthique et de la liberté. Il les contraignit à se disperser afin qu'ils finissent par retrouver l'une et l'autre.
Mais au fond, vous l'avez compris, ma conviction est que Dieu n'y est pour rien dans cette affaire. Ce sont les hommes, au contraire, qui sont les seuls responsables de leur malheur. Ils se sont dispersés parce qu'ils ont perdu leur liberté et leur sens de l'éthique. Ils ont fini par s'opposer les uns les autres pour sombrer dans une probable guerre civile. Ils se sont rassemblés en tribus ennemies et se sont consacrés finalement à une guerre sans fin. La guerre, cette activité mono-maniaque qui a privé l'humanité, durant des millénaire, et d'éthique et de liberté.
Mais aujourd'hui, nous qui avons su reconquérir la liberté, ne sommes-nous pas en train de la perdre à nouveau ? Parce que nous nous sentons méprisés par nos dirigeants, parce que nous ne saurions plus nous respecter les uns les autres, nous ne saurions plus respecter la nature, comme l'ont fait les habitants de l'île de Pâques. Parce que nous ne saurions plus nous tenir droit face à nous-mêmes et que nous préfèrerions la violence et le laxisme.
Voilà comment s'achève ma réflexion qui débuta à la fin de mes études. L'humanité n'est pas condamnée parce que Dieu refuse qu'elle s'unisse et qu'elle parle un langage commun. Elle peut survivre, en dépit de l'extraordinaire puissance qu'elle a accumulée entre ses mains.
Mais à une condition : qu'elle apprenne à être libre, pour toujours.
Franck C. Ferrier, Vice-président D&DS
Genève, le 15 septembre 2010
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