Conférence de Alain Marti

Déjeuner-débat à Genève

D&DS

Saison 2012-2013

Vendredi 11 mai 2012

au

6, rue de la Scie 1207 Genève

Nous aurons l’honneur de recevoir

Alain Marti

Alain Marti

sur le thème

Histoire de l’Organisation Judiciaire de Genève (1814-2010)

Résumé

Le titre donne l’impression que cet ouvrage est consacré à un sujet qui ne concerne que les habitués du Palais de Justice. Mais cela ne se vérifie que pour quelques chapitres seulement. Les autres sont proprement des pages de l’histoire générale de Genève, car le pouvoir judiciaire a été un enjeu politique à maintes époques et les affrontements idéologiques au Grand Conseil se sont succédé à propos de l’organisation judiciaire.
Le jury, par exemple, a toujours été en faveur auprès d’une partie non négligeable des conseillers d’Etat ou des députés. Même sous le régime de la Restauration. De grandes figures de l’époque en étaient de fervents partisans, même si ils ne sont pas parvenus à l’imposer. Il faudra attendre la personnalité bouillonnante de James Fazy pour que cette aspiration diffuse prenne enfin corps. Mais petit à petit, on a réduit le rôle du jury et on a fini par le vider de son sens. Quand la Confédération l’a balayé, il était déjà mort. Et pourtant, tout récemment encore, il a fait parler de lui dans le procès de la Banque Cantonale.
Depuis les révolutions radicales, il y a toujours eu un courant d’opinion pour parler d’une justice populaire à laquelle les conservateurs opposaient la justice tout court, car ils n’en connaissaient pas d’autre. D’abord dirigée contre l’ancienne classe dirigeante, cette tendance a voulu battre en brèche ce repaire des l’aristocratie que constituait pour lui le pouvoir judiciaire. A la suite d’un concours de circonstances tiré de l’histoire religieuse de Genève et de l’Europe, Carteret a inventé l’institution de juges assesseurs non juristes, pour mieux contrôler les juges. Quand il a été question de les abroger, le parti socialiste a lancé une initiative populaire pour obtenir l’élection des magistrats par le peuple. Il en avait été longtemps question, mais personne n’avait osé franchir ce pas. En réalité, les partis politique étaient plutôt désireux de garder la haute main sur la justice en élisant qui leur convenait. Les élections avaient été très politisées. Or, curieusement, l’élection par le peuple n’a pas changé cette situation et, très rapidement, des voix se sont élevées pour remédier à cela. Des réflexions sur l’indépendance de la justice, il n’est sorti que le Conseil Supérieur de la Magistrature.
Pendant de nombreuses années, la clef de voûte de nos institutions a été une loi sur la Responsabilité de Conseil d’Etat. Elle fut proposée par James Fazy, qui fut le premier à violer la séparation des pouvoirs, ce qui provoqua un conflit ouvert entre lui et le Procureur Général et ce dernier fut contraint de démissionner. Dans les années 1930, lors de la faillite de la Banque de Genève, cette loi se révéla inapplicable et fut abolie, au milieu des convulsions qui agitèrent la République dans un état de crise sans précédent.
De nombreuses pages de ce livre méritent ainsi de retenir l’attention de non juristes : c’est l’histoire chahutée et tourmentée de Genève qui défile sous les yeux du lecteur.

11h45  Accueil

12h10 Repas

13h00 Déjeuner-débat

Débats réservés aux Francs-maçons et Franc-maçonnes

Soyez les bienvenu(e)s.

Conférence de Christelle Girod

Déjeuner-débat à Genève

D&DS

Saison 2012-2013

Vendredi 9 février 2012

au

6, rue de la Scie 1207 Genève

Nous aurons l’honneur de recevoir

Christelle GIrod

Christelle Girod

Pédagogue diplômée, professeur de langue et de civilisation  françaises.
Présidente- Directrice de l’Alliance française de Genève. Elle y crée et dirige notamment le Centre d’ingénierie culturelle. Elle fonde en 2003, le cabinet COCREATION s.a.
En 2008, certifiée par Créa-France et l’Université Descartes-Paris  » Expert en créativité appliquée à l’innovation « .
En 2009 nommée Chevalier dans l’ordre des Palmes académiques.

 » Je me donne des règles pour être libre « 

Georges Perec

L’écriture créative … Écrire différemment

L’écriture : Pourquoi ne nous accompagnerait-elle pas pour le meilleur, pour le plaisir, pour la découverte de soi et des autres, pour approcher parfois l’art et même s’y installer. Pourrait-on reconsidérer l’écriture, non plus communément comme une terre inaccessible ou uniquement une partie récréative anodine ?
Comment déterminer les enjeux et de les mettre en relief ?
Soignons déjà notre premier outil, qui plus est, celui de tous, à l’oral comme à l’écrit : la langue.                                                               
Ce n’est pas le français qui  »  tirerait la langue « , ce sont toutes les langues et les cultures qui
seraient en danger. Agir pour la défense de sa langue et de sa culture, c’est aussi agir et reconnaître
les autres langues et cultures dans leur différence.
Aujourd’hui il est de bon ton de réclamer partout de la créativité, de postuler qu’il est urgent
de créer, de reconsidérer sans cesse les acquis, de ne pas s’endormir sur les succès. Quels efforts supplémentaires ou différents devraient être fournis, pour atteindre d’une part les jeunes (et aussi les
moins jeunes …) qui  ne comprennent pas très bien le pourquoi ni le comment de  » la défense et
illustration de la langue française « , d’autre part les seniors  qui vivent dans la peur de
l’anglais (plus exactement du globish qui est une autre histoire moins grave …)  qui ferait  » disparaître  » leur langue maternelle et de culture, et  enfin  ceux  qui pensent que la culture,  » c’est pour l’autre « ,
pour le privilégié, pour l’intellectuel ?

Réconcilier l’homme et la culture, c’est d’abord faire la démonstration qu’elle existe par
lui, pour lui et non contre lui. N’y aurait-il pas urgence de promouvoir des moyens suffisants pour décomplexer mais non pour simplifier ?
D’où viennent les souvenirs mauvais, les attentes contrariées, les croyances limitantes ?
Il est des ressentis  » de n’être pas à la hauteur par rapport aux autres « , ces autres qui se
serviraient de la culture comme d’une grille d’évaluation (par ex. les fameuses fautes
d’orthographe qui font la différence entre telle ou telle personne quant à son niveau d’études, une sorte d’ascenseur social). Certes  » bien écrire  » est souhaitable mais  » écrire  » l’est autant mais différemment.
Comment faire la démonstration que la langue est un outil qui forcément nous sert ?
Comment en cette langue, y aménager de la place pour de l’ailleurs et de l’autrement sans déclarer
la guerre aux gardiens de la grammaire, du style et des règles, qui sont les colonnes du temple ?
On ose parler (fautes ou pas) pourquoi n’ose-t-on pas toujours écrire ?  Proposons pour effectuer la transmission de ne pas toujours nous conformer au langage d’un groupe en ressassant des expressions prêtes à l’emploi, invitons les usagers du français à oser se servir librement  » dans la langue  » pour amener la rencontre avec la singularité de tous et  que des  » planches « , des écrits offrent la puissance de l’authenticité.

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Débats réservés aux Francs-maçons et Franc-maçonnes

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Grand Orient Arabe Oecumenique

Grand Orient Arabe Œcuménique


De l’obédience :

– Le Grand Orient Arabe Œcuménique prône, en dehors de ses structures, le dialogue interreligieux et vise à porter la fraternité au-delà des confessions. Constatant que peu de français et d’européens de confession musulmane fréquentent les obédiences maçonniques faute d’y trouver leurs repères culturels, le G.O.A.O. travaille avec un nouveau rite dit Œcuménique décrit plus loin.
– L’obédience est ouverte aux hommes et aux femmes de toutes nationalités, de toutes races et de diverses croyances. Elle vise à placer la fraternité non pas au-dessus des confessions, mais au-delà, et veut faire en sorte que chacun puisse découvrir et s’enrichir des pensées de l’autre. Elle rappelle que la laïcité qui la structure qui n’est pas une forme d’athéisme et que, naturellement comme partout en maçonnerie, la religion et la politique restent aux portes de la loge, propriétés du monde profane.
– Le Grand Orient Arabe Œcuménique travaille donc à la Gloire du Grand Architecte de l’Univers.
– Le Grand Orient Arabe Œcuménique est une puissance maçonnique indépendante et souveraine.
– Elle a pour devise : Liberté – Égalité – Fraternité.
– L’obédience est mixte et met l’accent sur l’étude et la recherche au sens maçonnique du terme.
– Ses trois Grandes Lumières traditionnellement placées sur l’autel de la loge sont : l’équerre, le compas et le Livre de la Loi sacrée. Ce dernier peut être soit l’Ancien Testament, soit l’Évangile selon saint Jean, soit le Coran, soit deux ou trois de ces ouvrages selon les circonstances.
– Les obligations des Maçons sont prêtées sous les trois Lumières et le choix du Livre de la Loi sacrée est laissé à l’initié.

Des moyens mis en œuvre :   

– De nombreux pays n’ont pas encore la chance de voir se développer librement des associations comme à la Franc-maçonnerie. La maçonnerie y est soit interdite, soit extrêmement contrainte. Le G.O.A.O. souhaite pourtant que les lumières qui se tiennent à l’Orient puissent également se tenir en Orient, pour en partager la fraternité et œuvrer à l’harmonie maçonnique.   

– Heureusement, depuis le XVIIIe siècle qui vit la naissance de la maçonnerie, les progrès technologiques sont importants. Internet, par exemple, représente le moyen de communication et de connaissance le plus largement partagé dans ces pays qui restreignent la forme d’expression maçonnique. C’est pourquoi il est dans les missions du G.O.A.O. d’entrouvrir les portes de la maçonnerie dans la conception universelle et œcuménique qui est la sienne, c’est-à-dire détachée de toute idée religieuse et plus encore de toute notion de salut comme de sécularisation, par l’intermédiaire de cette technologie.

– La connaissance de la symbolique maçonnique, de ses récits fondateurs ou non, comme de ses mythes et de ses rituels n’est plus un secret pour toute personne sachant lire et consulter quelques uns des milliers de livres (ou de sites Web) sur le sujet. Tout y est dit, décrit, expliqué voire imagé. Le G.O.A.O. se propose donc par la voie d’internet de soutenir tout candidat sur le chemin de l’initiation à partir du moment où il réside dans l’un de ces pays contraints.

– Pour autant, l’initiation « à distance » ne peut qu’être un leurre. Elle doit être vécue entourée de frères et / ou de sœurs travaillant ensembles à sa réussite. C’est une œuvre nécessairement collective au profit d’un seul, une expérience sur soi qu’aucun savoir ne saurait remplacer. Le G.O.A.O., par son organisation novatrice, satisfait à l’ensemble de ces exigences.
   
Du rite Œcuménique

Il est un constat désolant pour des défenseurs de la fraternité, c’est que très peu de français et européens de confession musulmane fréquentent les loges maçonniques, toutes obédiences confondues. Cette échec à la fraternité s’explique par de nombreuses raisons, mais il est évident que les rituels que la maçonnerie propose, les décors qui ornent nos locaux et les récits historiques ou mythologiques (Hiram) qui les soutiennent n’ont aucun point commun avec le monde Islamique. Les rappels à la symbolique chrétienne ou judaïque de nos rituels sont nombreux et parfois très explicitent (cf. le chevaleresque RER, le rite d’York…).

– Un frère (ou une sœur) de confession musulmane est forcément en perte totale de repères culturels. Rien, en effet, ne vient conforter son regard ou tisser un lien avec son passé, son histoire sociale et religieuse.
– Nos rituels occidentaux relatent des chroniques anciennes de la Bible, du Talmud ou nous parlent de kabbale dans une débauche de termes hébraïques et de références chrétiennes. Et plus l’on monte dans les hauts grades, plus cela se vérifie.
– Depuis l’affaire Dreyfus au XIXe siècle, l’image du « complot judéo-maçonnique » à laissé des traces persistantes qui évoquent trop souvent le juif comme une origine du mal, de la délinquance morale ou financière. N’est pas Satan qui veut, mais le juif de ces caricatures ne travaille pas seul puisqu’il fait corps avec le franc-maçon, qui élabore sans cesse d’infâmes complots contre la république dans la pénombre de ses ateliers.
– Tout ceci enfin tisse un lien fort avec l’état d’Israël où la maçonnerie aux racines juives est une machine assurément sioniste et anti-islamique, qui travaille à la gloire du judaïsme.
– Précisons encore que le protestantisme est largement représenté, depuis le texte fondateur des Constitutions d’Anderson au tout début du XVIIIe siècle, avec son lot de pré-requis non négociables sur la croyance en Dieu, celui des chrétiens naturellement.   

Le rite Œcuménique est inspiré du Rite Écossais Ancien et Accepté et de l’ancienne maçonnerie musulmane opérative, ainsi que des branches initiatiques de l’Islam (soufis, druzes et ismaéliens). Il fait toujours appel aux symboles et références communs au judéo-christianisme mais emprunte également à la symbolique musulmane (comme, par exemple, des signes de reconnaissance, une symbolique des couleurs en Islam ou du voyage initiatique du Prophète). Les trois grandes religions du Livre sont ainsi également représentées afin que chacun s’enrichisse des pensées de l’autre. Il s’agit bien ici, et uniquement, d’instaurer des repères culturels communs afin que chacun trouve sa place dans le déroulement d’une tenue.

Enfin, il est composé de sept degrés, précédés d’un état d’Aspirant / Mourid.

– Le 1° degré (Apprenti/Mubtad’i) est l’équivalent du 1° degré du REAA
– Le 2° degré (Compagnon/Mouqadem) est l’équivalent du 2° degré du REAA
– Le 3° degré (Maître/Nassib) est l’équivalent du 3° degré du REAA
– Le 4° degré (Maître Secret/Saïs= Vénérable) est l’équivalent du 4° degré du REAA
– Le 5° degré (Chevalier Rose-Croix /Naqib) est l’équivalent du 18° degré du REAA
– Le 6° degré (Chevalier Kadosch/Cheikh Aql) est l’équivalent du 30° degré du REAA
– Le 7° degré (Grand Commandeur / Al Qutb Al A’Azam) est l’équivalent au 33° degré du REEA


Quand la magie orientale s’incruste dans la tradition maçonnique


Quand la magie orientale s’incruste dans la tradition maçonnique. Ces rituels des quatre premiers degrés du rite Œcuménique (qui en compte sept), se structurent sur l’héritage des pères fondateurs, le REAA de 1804, et s’inspirent de l’ancienne maçonnerie musulmane opérative ainsi que des rituels des branches initiatiques de l’islam (Soufis, Druzes et Ismaéliens). C’est une adaptation (devrai-t-on dire « infiltration » ?) de ces rites orientaux qui sont synoptiques au REAA, mais qui à la différence des « nôtres », possèdent un aspect résolument magique. Ces « mystères » forment un apprentissage qui se complète au fil des grades, comme le récit d’Hiram qui se déroule en parallèle de la même manière.

En effet, les rituels qui soutiennent ces mystères orientaux sont étonnamment sont proches des rituels maçonniques, sur la forme comme sur le fond, à ce point qu’ils en sont parfois synoptiques (à la manière des évangiles du christianisme).
Le rite Œcuménique vise donc à « re-lier » la symbolique des trois mondes abrahamiques (chrétien, judaïque et musulman) en s’imprégnant des mystères de cet ésotérisme oriental.
Ce rite récent se pratique en France et en Orient, et cette édition est réalisée (un peu dans l’urgence) pour le Liban (pays arabe multiconfessionnel type) dont la maçonnerie est en pleine restructuration.
Les rituels sont complets (ouverture des TT :., fermeture, élévation et Instructions) et présentés dans leur contexte par une introduction d’une trentaine de pages.
N’en disons pas plus… il faut vous réserver du plaisir !

ISBN : 978-2-296-54445-1, 18 €, sortie fin février / début mars 2011.


La femme immortelle

woman leaning on her knees

La femme immortelle

Publié par Nicolas Munoz de la Mata


Qui connaît Henrietta Lacks ? Personne, ou à peu près. Et pourtant, nous lui devons tous quelque chose — et pour certains, la vie, ce qui n’est pas rien…
L’Histoire de cette femme, relatée par Rebecca Skloot, est d’abord parue chez Radom House, sous le titre «The immortal life of Henrietta Lacks ». Puis, en janvier dernier, en langue française, chez Calmann-Lévy.

Résumer le destin d’Henrietta Lacks, c’est se condamner à ressasser les mots « femme », « noire », « cobaye », « médecine » sans pour autant communiquer l’essentiel. Car c’est post mortem qu’elle a acquis.

Résumons  cette exceptionnelle histoire: en février 1951, Henrietta Lacks, une pauvre femme noire de 31 ans, qui a longtemps travaillé dans les champs de coton, comme ses ancêtres esclaves, est admise à l’hôpital Johns Hopkins de Baltimore. Créé à la fin du XIXème siècle à la suite d’un legs philanthropique, Johns Hopkins (devenu l’un des plus prestigieux centre de recherche médicale) a obligation, pour respecter la volonté du testateur, d’accueillir des patients indigents, sans distinction de race, qui n’ont pas les moyens de payer leurs soins — id est : des noirs, pour l’essentiel. Henrietta se plaint de douleurs au ventre. On lui diagnostique un cancer de l’utérus. Les médecins, sans lui demander son avis (ce qui, à l’époque, n’est pas illégal), lui prélèvent quelques cellules saines, ainsi que quelques cellules de sa tumeur.
En ce début des années 1950, les laboratoires du monde entier tentent de décrocher le Graal : la culture de cellules humaines, pour développer les expériences in vitro. Mais tout rate, partout : quand par miracle les cellules survivent en éprouvette, elles ne se reproduisent pas. On a pourtant tout essayé pour les nourrir : du sang de fœtus de bovin, du sang de poulet, du sang de cordon ombilical humain… Rien n’y fait.

C’est donc sans grand espoir que les médecins tentent de cultiver les cellules d’Henrietta Lacks. Ses cellules saines meurent d’ailleurs rapidement. Mais ses cellules malignes survivent. Et, miracle, elles se reproduisent à une vitesse vertigineuse. Le cancer d’Henrietta est lui-même foudroyant. Elle meurt le 4 octobre 1951, dans d’atroces souffrances. Mais, entre-temps, ses cellules ont déjà commencé de conquérir le monde, sous le nom de code HeLa (les deux premières lettres de ses nom et prénom).
Les cellules HeLa iront partout : elles traverseront la Cordillère des Andes à dos de mulet, elles prendront l’avion, le bateau, la voiture… la NASA les enverra dans l’espace… Il est impossible, aujourd’hui, d’estimer leur nombre. Une chose est sûre : il faudrait compter en milliards de milliards. Et elles continuent de se reproduire dans tous les laboratoires, où elles sont employées aussi bien par la médecine que par l’industrie cosmétique. Les cellules HeLa ont servi à percer les mystères du génome humain, elles ont servi à mettre au point le vaccin contre la polio, et j’en passe, et j’en passe. Bref, elles sont devenues, selon le mot de Rebecca Skloot, « la bête de somme de la biologie ».
 Dès les années 1960, des journalistes scientifiques avertis des miracles opérés grâce aux cellules HeLa souhaitaient informer le grand public de cette aventure peu banale. Ils désiraient donc « connaître les éléments fondamentaux liés au côté humain de l’affaire ». En clair : savoir la personne qui se cachait derrière l’appellation HeLa — on savait juste que c’était une femme de race noire. Le laboratoire qui avait prélevé les cellules refusa, de crainte « de s’attirer des ennuis en le révélant » (sic).

En 1973, un chercheur publiait une petite annonce dans la prestigieuse revue Nature : « Cette femme a véritablement atteint l’immortalité, à la fois dans les tubes à essai et dans le cœur des scientifiques du monde entier. Pourtant, nous ne connaissons pas son nom ! Quelqu’un a-t-il la réponse ? » Pour contrer la curiosité grandissante, le laboratoire lança des fausses pistes, évoquant une Helen Lane ou encore une Helen Larson, qui bien sûr n’avaient jamais existé.
 
Ce n’est qu’à la fin des années 1990 que le nom d’Henrietta Lacks fut — timidement — dévoilé. Pour Rebecca Skloot, jeune journaliste scientifique, ce fut une révélation. Le grand œuvre de sa vie : elle allait restituer la biographie d’Henrietta, soldate inconnue morte au champ d’honneur de la science. L’entreprise lui a pris dix ans. Le résultat est admirable par quelque bout qu’on le prenne : c’est un formidable travail d’enquête journalistique, c’est un formidable témoignage humain. Le point d’orgue de l’émotion est sans doute atteint quand, grâce à l’entremise de Rebecca, Debborah, la fille d’Henrietta, est admise dans un laboratoire pour observer les cellules de sa mère au microscope, et que celles-ci se reproduisent sous leurs yeux.

Depuis soixante ans, les cellules d’Henrietta Lacks ont donné lieu à un commerce lucratif, et enrichi nombre de personnes à travers le monde (car bien sûr, les cellules HeLa ne se donnent pas : elles se vendent…). Mais la famille d’Henrietta, elle, est toujours aussi pauvre, et n’a toujours pas les moyens de se payer le médecin…
Ce livre apporte tant de révélations (on est abasourdi, par exemple, d’apprendre que dans les années 1950, les cellules HeLa ont été inoculées à des humains non avertis — de préférence des femmes pauvres ou des détenus…) qu’il pose de multiples questions. Il devrait aussi faire réfléchir tous les eugénistes, car c’est quand même une négresse misérable et souffreteuse, rongée par les maladies vénériennes, qui aura contribué à l’élévation de l’espérance de vie de toute l’humanité…  
 
…Aussi, quelle que soit sa morphologie et la pigmentation plus ou moins prononcée de son épiderme, tout être humain devrait désormais considérer qu’il appartient à la famille d’Henriette Lacks

Nicolas Munoz De La Mata

Divagations en zig-zag

Divagations en zig-zag

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Créateur, Création, n’est-ce pas tout un?

Publié par Hermann Jenni, le 16 avril 2001


Créateur, Création, n’est-ce pas tout un ?

Selon ce que nous disent les théologiens, la Création est l’oeuvre de Dieu, lequel Dieu est omniscient, omnipotent et omniprésent.

Belle définition en vérité si ce n’est que le propre de la définition est de tracer un contour de la « chose » définie afin de la différencier de ce qu’elle n’est pas et, par conséquent, de la borner.

Or, l’omniprésence est justement une qualité sans borne qui ne laisse place à aucune autre « chose » que celle, unique, qui possède cette qualité.

Quant à l’omnipotence, elle suppose, pour celui qui la détient, l’exclusivité discrétionnaire de tous les pouvoirs est donc l’absence de liberté réelle pour tout être qui ne serait pas Dieu.

L’omniscience, quant à elle, me semble être la plus ennuyeuse des « qualités » prêtées à ce Dieu réputé parfait. Elle exclu la capacité d’apprendre et le progrès vers un futur imprévisible. (Le plaisir d’apprendre est l’apanage de l’ignorant.) Un dieu omniscient doit être un Dieu qui s’ennuie mortellement.

La perfection, dans son sens absolu, est fort heureusement une notion abstraite car son corollaire, l’imperfectibilité, aurait comme conséquence l’impossibilité du progrès comme de la régression. Un Dieu parfait serait immuable et par conséquent serait un Dieu mort.

Mais qui voudrait d’un Dieu mort?

Certes pas les créatures qu’Il a, semble-t-il, faites à son image et qui, pour se venger sans doute de leur évidente imperfection, l’ont imaginé, à leur tour, avec toutes les inconséquences de leurs définitions.

Ressuscitons donc ce Créateur, si semblable à ses créatures et à toute sa Création qu’Il se confond avec elles.

Par conséquent ne craignons pas de lui restituer l’imperfection qui permet le progrès ainsi que le Diable et son train qui nous donnent au moins l’illusion, sinon la certitude, du libre choix dans la distinction que nous opérons entre le »bien » et le « mal ».

Ainsi, la Création s’achève et n’est point achevée; mue par une progression qu’on espère sans fin. Créationnistes et évolutionnistes peuvent continuer leurs controverses en vain car ils observent, chacun d’un point de vue borné, deux aspects d’un seul et unique phénomène.

À l’échelle de l’Univers je crois que, Dieu merci, le septième jour de la Création qui pourrait bien signifier la fin du monde est encore loin, très loin, à l’infini des temps.


Y a-t-il, dans la nature, une loi sans exception ?

Publié par Hermann Jenni, le 25 octobre 2000


Trier, classer, catégoriser, ranger sous étiquettes qui soumettent à des lois, à des analogies, telle est l’occupation essentielle des scientifiques, quelles que soient leurs spécialités.

Pourtant, l’examen poussé des sujets ainsi classés sous une même étiquette révèle immanquablement des différences, d’importance variable, qui obligent à reconnaître des sous-catégories.

Des méthodes d’investigation sans cesse perfectionnées révèlent des différences jusque parmi les objets les plus élémentaires.

Certains atomes ont des isotopes. N’est-il pas concevable qu’une analyse rendue possible au niveau des constituants ultimes de la matière puisse révéler des différences telles qu’il serait peu probable, voire impossible, de trouver deux éléments rigoureusement identiques ?
A un niveau plus complexe qui est celui des cristaux de neige, tous construits sur un plan exagonal, on croit savoir qu’il n’en a jamais existé deux absolument pareils, et pourtant, depuis que notre terre reçoit des flocons, il en est probablement tombé plusieurs fois son volume.

Si cette hypothèse se vérifie, on peut être certain qu’il n’existe aucun organisme vivant qui n’ait sa réplique exacte, et cela, même chez ceux qui seraient issus d’un clonage où, pour imperceptible qu’elle soit, la mutation devrait être la règle.

A la question posée en titre nous pourrions donc répondre :  » La seule loi qui ne comporte aucune exception est qu’il n’existe que des exceptions. « 

Confrontée à cet illogisme que devient notre hypothèse de la « brique » unique ?

Je pense qu’elle garde néanmoins un sens à condition que toutes les combinaisons avec elle-même, qu’elle élabore à l’infini simultanément, diffèrent les unes des autres ainsi que de celles qui précèdent ou qui suivent.
Mais, si cela est vrai, nous voilà avec une deuxième règle qui ne souffre aucune exception sur les bras !

Cela admis (toujours provisoirement) nous pourrons en tirer deux conclusions apparemment contraires :

1) La vertigineuse imagination créatrice de l’Univers dépassera toujours notre entendement. .

2) L’ Ego qui borne nos individualités pourrait bien n’être qu’une limite factice qui, pour une durée infime, nous distinguerait dans cette création constante dont nous serions pour l’Eternité.

Résoudre cette contradiction ne pourait-il pas nous conduire à concilier, enfin, évolutionistes et créationistes?


Liberté… mais surveillée !

Publié par Hermann Jenni , le 8 août 1996


Liberté ! Voilà un grand mot auquel on attribue une grande signification. On est prêt à bien des sacrifices pour ce mot. Sacrifices librement consentis, bien sûr.
Voire !

Qu’est-ce que la liberté? Une faculté de choix, de décision, de refus ou d’acceptation? Mais en fonction de quels critères?

Si, ignorant les paramètres permettant d’apprécier les avantages et inconvénients d’une décision, on s’en remet au hasard, est-ce encore un choix? Où est la liberté ?

Si en revanche, le choix est basé sur la parfaite connaissance de tous les paramètres objectifs pouvant guider et déterminer la décision; y a-t-il encore place pour un libre choix qui ne soit pas irrationnel? Faut-il être déraisonnable pour être libre?

Et pourtant, nous éprouvons, ancré au plus profond de notre être, ce sentiment ou, à tout le moins, cette aspiration à la liberté.

Serait-ce que la liberté ne se résoudrait qu’à une simple distinction des contraintes internes opposées aux contraintes externes davantage ressenties comme devant être subies ?

Cependant, il est plus facile de se soustraire aux contraintes externes que l’on peut fuir qu’à celles de nos caractéristiques intrinsèques dont, bon gré mal gré,nous devons nous accommoder.

Ces contraintes internes peuvent même nous conduire à une soumission totale ou quasi-totale à certaines contraintes externes. Tel est le cas, par exemple du disciple qui, s’étant « choisi » un Gourou pour penser à sa place, le suit désormais sans le moindre discernement.

Sans aller jusqu’à la soumission, corps et âme, à quelque « Führer », le simple souci que nous pouvons avoir de l’opinion d’autrui à notre égard ne nous contraint-il pas en permanence dans notre comportement et notre expression?

Entre les contraintes externes et internes quel espace reste-t’il pour exercer, ne serait-ce qu’une apparence de liberté? Celle qui consisterait en la faculté de mal choisir, délibérément?

Outre le problème de la responsabilité, cette alternative introduit la question de définir le « bien » et le « mal » et de les distinguer l’un de l’autre; sujet qui pourrait être maltraité dans de prochaines divagations en zigzag. Mais revenons à la liberté liée à la responsabilité.

Mythe ou réalité, cette liberté est quelque chose que nous ressentons profondément et à quoi nous tenons d’autant plus qu’elle nous est mesurée.

Une liberté totale n’aurait aucun sens. Ressemblant au vol désordonné d’une plume tombant dans un vent tourbillonnant elle illustrerait l’absence de tout projet et serait plutôt une soumission totale aux hasards de l’existence.

Finalement, je crois que, toute relative qu’elle soit, la liberté n’est pas un concept vide de sens. Elle doit se mesurer au degré de maîtrise de soi qu’acquiert l’individu, compte tenu de toutes ses caractéristiques propres,qu’elles soient génétiques, d’éducation ou d’expérience, pour les combattre ou les développer, ou tout simplement, pour les assumer en pleine responsabilité.

Liberté et responsabilité ne seraient-ils pas simplement deux aspects d’une seule et même notion ? Est-ce réservé exclusivement aux individus parfaitement sains d’esprit ? Je ne renoncerai pas pour autant au pseudo nymeque j’ai librement choisi pour assumer cette rubrique.


La « brique » élémentaire »

Publié par Hermann Jenni, le 11 juillet 1996


Nos savants atomistes sont à la recherche du constituant ultime de toute « chose », notamment au CERN où l’on s’efforce de casser les plus infimes particules pour en séparer les éléments.

Il n’est pas interdit de spéculer, (voire d’élucubrer) sur le résultat possible de ces recherches en se posant quelques questions, quitte à esquisser des réponses toutes provisoires.

1/ De quoi pourrait être « faite » cette brique élémentaire ?

Réponse : Si cette brique était faite elle aurait des constituants et ne serait parconséquent pas élémentaire. Cette brique n’est donc pas faite; elle est, point final. Vouloir qu’elle ait, ne seraient-ce que des « caractéristiques » signifierait déjà qu’elle pourrait n’être pas unique, qu’elle comporterait éventuellement desvariantes. Formidable concentration d’énergie, selon certains ? Peut-être; mais
cela ne saurait nous suffire. Qu’est-ce que cette énergie ?

2/ Que peut-on exclure de cette brique élémentaire ?

Réponse : On ne saurait pas davantage exclure qu’attribuer à cette brique
élémentaire quelque constituant ou caractéristique que ce soit. Exclure c’est déjà tracer un contour, différencier, et donc introduire la pluralité potentielle.

Pour être vraiment élémentaire, cette brique doit être unique au plein sens du terme. Est-il absurde d’imaginer que toute la construction du Cosmos pourrait n’être pas faite d’une infinité de « briques » rigoureusement identiques pour la simple et bonne raison que la pluralité c’est déjà la diversité ?

Alors ? Une seule et unique brique, autant dire rien ! Le néant qui, combiné à lui-même dans une construction dont la complexité s’accroît sans cesse, échafaude l’Infini ! Fantastique ! (ou phantasme)

Objection ! Comment cette particule, ce néant qui n’occupe pour ainsi dire aucun espace pourrait-il se trouver simultanément en deux points différents, à fortiori occuper et constituer tout l’espace ?

Parmi les particules les plus fines et pourtant certainement déjà complexes mises en évidence par nos chercheurs, il s’en trouve qui sont, semble-t-il, dépourvues de masse. Par conséquent leur inertie doit être nulle. Est-il défendu d’imaginer qu’une telle particule puisse être animée d’une vitesse qu’on pourrait qualifier d’absolue et, par conséquent, être douée d’ubiquité parfaite, soit présence simultanée en tout lieu, de l’infini à l’infini ?

La théorie de la relativité élaborée par EINSTEIN nous apprend cependant que l’écoulement du temps n’est pas uniforme et immuable. Il serait inversement proportionnel à la vitesse de l' »objet » dont on mesure la durée.

Prenons donc la liberté de dire que pour une vitesse absolue le temps pourrait bien cesser de s’écouler. Le passé et le futur ne seraient plus séparés par cette limite impalpable et mouvante que constitue pour nous le « moment » présent.

Nous serions alors dans l’Eternité.

Si bien que nous pouvons conclure en toute simplicité que nos savants chercheurs lancés à la poursuite de la brique élémentaire pourraient bien n’aboutir qu’à « tuer le temps », au sens littéral comme au sens figuré de l’expression !

CQFD


Le temps de l’altruisme

Le Temps de l’altruisme

boys, adolescence, friendship

Publié par Nicolas Munoz de la Mata

Le triangle qui symbolise notre Ordre comporte une base, qui pourrait indiquer que le FM doit avoir « les pieds sur terre ».
Et deux versants qui pointent vers le haut: D’un côté LA FRATERNITÉ (Cf. Jacques Attali et ma planche) de l’autre « LE TEMPS DE L’ALTRUISME ». Cf. le récent ouvrage de

Philippe Kourilsky

Tout juste sorti de l’Ecole Polytechnique Philippe Kourilsky a une idée en tête : faire de la biologie. C’est au laboratoire de Jacques Monod qu’il se présente, mais malheureusement les places sont déjà prises. C’est alors sur les conseils de Jacques Monod que Philippe Kourilsky rencontre le biologiste François Gros, de renommée internationale. La rencontre est immédiate. Une complicité intellectuelle se noue immédiatement entre François Gros biologiste reconnu et le novice qu’était Philippe Kourilsky.
Après une thèse de biologie sur les bactériophages, Philippe Kourilsky revient au laboratoire de François Gros et commence avec d’autres pasteuriens à « bricoler génétiquement » comme il le dit lui-même. Ce sont les débuts du génie génétique. En 1975, Philippe Kourilsky, François Rougeon et Bernard Bach réalisent une grande première : le clonage d’un ADN complémentaire. « Ce fut une époque passionnante : nous étions peu dans le monde à posséder la technologie du clonage. C’est à cette époque que Jacques Monod, directeur de l’Institut Pasteur, créa l’Unité de génie génétique ».

De la biologie à l’immunologie

En 1981, le frère de Philippe Kourilsky, François, directeur général du CNRS, lui souffle l’idée de travailler en immunologie. Philippe s’exécute, travaillant plus spécifiquement sur le système d’histocompatibilité, le système HLA qui allait faciliter plus tard le traitement des maladies auto-immunes et de certains cancers.
Mais Philippe Kourilsky précise, « ce qui m’intéressait initialement, ce n’était pas l’immunologie, mais de travailler sur un système de gènes très polymorphes ! C’est ainsi que de fil en aiguille je suis devenu immunologiste ».
Fort de cette expérience en immunologie où la recherche fondamentale côtoie la recherche appliquée, Philippe Kourilsky se lance un pari à la même époque, créer la première société de biotechnologie française : la société Transgène ; une idée en tête : « associer recherche fondamentale et appliquée ». Transgène conçoit et développe des produits d’immunothérapie pour le traitement des cancers et des maladies infectieuses chroniques.
Parallèlement Philippe Kourilsky poursuit son ascension à l’Institut Pasteur où il est entré en 1972. Il devient Directeur général de l’Institut entre 2000 et 2005, époque où il voit arriver l’épidémie de SRAS (2002) et celle de la grippe aviaire (2004). « Suite à ces deux épidémies nous avons développé notre réseau à l’international. Nous avons ouvert des antennes en Corée, à Shanghai, à Monte-Vidéo, et dans une vingtaine de villes en Amérique de sud. L’Institut Pasteur est une merveilleuse institution qui associe biologie et objectifs de santé publique ».
Une nouvelle aventure à Singapour : Singapore Immunology Network
Après la direction générale de l’Institut Pasteur, ces conseils sont sollicités pour la création d’un Institut public de recherche à Singapour : Singapore Immunology Network. Très vite il en devient le directeur en 2006. Et Philippe Kourilsky de préciser : « Nous avons beaucoup à apprendre sur la manière dont on opère à l’étranger. Les mécanismes de décisions sont infiniment plus rapides et donnent des cinétiques de développement extrêmement impressionnantes. Nous avons débuté avec une équipe de 37 scientifiques, nous sommes aujourd’hui plus de 200 ! » A la question « vous détournez-vous du système de recherche français ? », il répond que « la science est devenue tellement internationale qu’elle ne connaît plus vraiment de frontière. Mais il est vrai que l’accès aux technologies de pointe est difficile en France ».

Philippe Kourilsky : scientifique altruiste

Dans son dernier essai Le temps de l’altruisme paru chez Odile Jacob en 2009, Philippe Kourilsky revient sur la nature de l’homme : « L’homme n’est pas foncièrement mauvais. Ma conviction est que l’approfondissement de la connaissance est de nature à élargir le contenu que nous donnons aux objets et que ce faisant en élargissant ce contenu, nous nous équipons mieux pour traiter des problèmes éthiques ».
Mais ne pas confondre altruisme et générosité ! « Plus les libertés individuelles sont grandes et développées (c’est le cas des pays riches), plus notre devoir d’altruisme est important, ce qui a des conséquences évidentes comme la lutte contre le réchauffement climatique par exemple. Il ne fait aucun doute que les pays développés ont des obligations plus importantes que les pays en voie de développement. La générosité en revanche fait partie de l’espace de nos libertés. Nous sommes libres d’être généreux ou non, alors que l’altruisme est un devoir. On ne peut pas fonder un système stable sur la générosité, mais on peut le fonder sur l’altruisme » assure Philippe Kourilsky. Il y a 10 ans, 700 à 800 000 enfants mourraient de la rougeole ou de ses complications alors qu’il existe un vaccin. Aujourd’hui ils ne sont « plus » que 250 000. « Ceci a été possible grâce à l’OMS, opération financée elle-même par la générosité de la fondation Bill Gates. Que ce serait-il passé si Bill Gates avait financé une galerie d’art contemporain ? »
Attention donc à ce que la générosité ne soit pas un cache-misère. « Cet exemple pose également la question de savoir à partir de quand la générosité est instrumentalisée là où on manque d’altruisme ».
Parler d’altruisme en pleine période de repli économique n’aboutit pas forcement à des échos positifs. Philippe Kourilsky en est conscient. Mais « mieux équiper notre “boîte à outil conceptuelle et intellectuelle” en y faisant entrer la notion d’altruisme est quelque chose de possiblement utile, même si cela n’apporte pas de solution immédiate ».
Ainsi Philippe Kourilsky termine-t-il son essai et cette émission : « A une altermondialisation, il faudrait substituer une altrui-mondialisation, et faire de notre planète une autre cité, qui serait aussi la cité des autres ».

Philippe Kourilsky est immunologiste, membre de l’Académie des sciences, professeur au Collège de France, directeur honoraire de l’Institut Pasteur.

En savoir plus :
Philippe Kourilsky, professeur au Collège de France
Philippe Kourilsky, membre de l’Académie des sciences
A écouter aussi La biologie dans l’université et les institutions de recherche françaises par Philippe Kourilsky
Philippe Kourilsky, Le Temps de l’altruisme, édition Odile Jacob,2009